Mon manifeste d'amour au peuple 2/3
 




Mon manifeste d'amour au peuple 3/3


I-SLAM : ISLAM POSTMODERNE








Accès direct à l'ensemble des articles منفذ مباشر إلى مجموع المقالات
(Voir ci-bas انظر بالأسفل)
Site optimisé pour Chrome

dimanche 22 octobre 2023

Dictature mentale 6

Normalisation avec Israël :

Ne pas servir la stratégie du pire* 



L’attaque suicide du Hamas à Gaza a rouvert la boîte de Pandore du conflit de Palestine qui dure depuis près d’un siècle dans un total autisme et une amnésie de ses propres valeurs d’une communauté occidentale qui en a été, pourtant, à l’origine. 

Aussi le martyre du peuple palestinien toujours dépossédé de sa patrie continue-t-il à susciter auprès des Tunisiennes et Tunisiens leur solidarité de tout temps. Car il s’agit bien d’une affaire nationale, et la Tunisie se doit d’honorer son devoir de soutenir toute cause juste notamment quand elle bénéficie, comme pour la Palestine, de résolutions onusiennes explicites. Or, bien que reconnaissant son droit à une partie souveraine, cette légalité internationale est gelée, étant bafouée par une occupation illégale et sauvage, encouragée à la folie et au terrorisme par la démission des puissances du moment, qui l’encouragent même en se refusant à y mettre le holà. 

Dérive des valeurs humaines

C'est que le monde est en pleine dérive des valeurs ; saisi par ses démons multiples que sont, entre autres, xénophobie, racisme, haine de l'étranger, il marche sur la tête. Les tragiques événements de ces derniers jours, les macabres scènes du martyre de Gaza, semblent même y avoir eu raison de la raison. Ce qui a amené ceux supposés rester neutres, prétendre jouer aux arbitres ou amiables compositeurs, à s’aligner sans vergogne sur une partie contre une autre, poussant d'autres, en réaction, à s'adonner à la protestation, préférant les slogans à l’action, acculés à s’agiter faute de pouvoir agir.

Ainsi a-t-on vu, chez nous, revenir au premier plan cette initiative renouvelée de loi criminalisant non seulement la normalisation avec Israël, mais sanctionnant aussi sévèrement toute volition en l’objet, ainsi que l’a précisé le président du parlement.

Est-ce avec une telle réaction symbolique qu’on réussira à contrer la dérive des valeurs humaines, apporter ce qui manque le plus aujourd’hui à la juste cause palestinienne : une vision lucide et le propos sensé pour une solution non seulement juste mais nullement utopique, sinon en apparence, car réalisable si l'on fait preuve d'honnêteté et de réelle volonté de paix ?

Car interdire et sanctionner toute tentative de négociation directe avec le principal protagoniste de la tragédie palestinienne, celui qui ne fait que l’entretenir et l’aggraver, c’est tout simplement aller dans le sens de sa propre stratégie consistant à maintenir le statu quo tout en continuant à susciter les occasions pour justifier chaque jour davantage de nouvelles annexions de territoires au prétexte d’assurer sa sécurité.

Aussi, c’est tout dans l’intérêt des faucons d'Israël qui maîtrisent le gouvernement actuel que de voir les États arabes interdire et criminaliser la normalisation avec leur État. C’est le plus beau cadeau à leur faire ! Certes, ils encouragent bien la normalisation, mais juste pour se faire une virginité avec l’assurance que l’État arabe concerné ne le fera que pour les privilèges nationaux qu’ils lui garantira, comme de reconnaître, pour le Maroc, sa souveraineté sur le Sahara occidental ou de l’assister dans sa guerre avec l’Algérie.

Par conséquent, voter une Tunisie la loi en cours de discussion au parlement, ce n'est pas vraiment être utile à la cause palestinienne, lutter contre la dérive des valeurs humaines qu'on y vérifie tous les jours, ce que confirment les événements de ces derniers jours. Et c'est aussi, sans s'en rendre compte, être complice objectif de la stratégie du pire qui est la marque de fabrique de l'État colonial d'Israël et sa politique expansionniste illégale et criminelle.        

Contrer la stratégie du pire

Or, la vraie normalisation est loin d’être le marché de dupes qu'on est prompt à dénoncer au vu de ce qui s'est passé à ce jour. Elle est et doit être la première étape d’une stratégie éthique et juridique dans le sens de la paix juste et durable, en conformité avec la légalité internationale et la justice humaine. C’est de même la meilleure parade au racisme structurel pratiqué par le gouvernement actuel d'Israël, et dont il se défend en le prétendant oeuvre arabe du fait du refus de reconnaître son État qui ne fait plus doute, étant une évidence auprès de la quasi-unanimité des pays du monde.      

De plus, n'invalide point cette vision rectifiée de la normalisation, faite selon les normes et les valeurs indiquées, le triste fait que les pays arabes qui y ont eu recours ont failli dans l'impératif catégorique de soutien aux Palestiniens qui devait être le leur, et comme ils ne le nient pas, au demeurant. D’autant mieux qu’aucune paix en Palestine, comme ailleurs, ne saurait être envisagée sans la réunion des principaux protagonistes autour d’une table de négociation. 

C'est bien ce qu’avaient fait à Oslo Arafat et son ennemi Rabin, et qui devait aboutir à une paix globale n’était l’assassinat du dirigeant israélien par un nervi de la droite extrémiste actuellement au pouvoir dans le gouvernement de Benjamin Netanyahu, le plus à droite de l'extrémisme lié à l'histoire du pays. Le chef dudit gouvernement n'a, d’ailleurs, jamais caché son refus d’un tel processus, ayant toujours agi machiavéliquement à torpiller la moindre tentative crédible d’y aboutir. Ainsi a-t-il soutenu par des financements indirects publiquement assumés les branches palestiniennes les plus farouches à Israël, comme le Hamas, en vue de contrarier l'hypothèse d’un État palestinien en Cisjordanie et à Gaza.

Aussi, au lieu de criminaliser la normalisation, se révélant alors être une complicité au service de cette droite  sanguinaire qui ne souhaite que cela, il importe plutôt de contrarier sa stratégie du pire et ses plans en les contrant. Or, ce n'est pas en tournant le dos à la négociation que l'on refusera le maintien du statu quo qui est invariablement excipé par Israël en prétextant que les Arabes refusent sa reconnaissance imposée par la légalité qu'ils revendiquent pourtant. 

Nous pensons donc qu'en rappelant sa conviction de l’unité de l’humanité, conviction jamais altérée malgré les avanies des temps et les injustices des humains, la Tunisie se doit d'oser renoncer à adopter la loi en préparation et qui viole cette conviction. En son lieu et place, elle pourra proclamer solennellement au parlement être prête à normaliser ses relations avec Israël selon une méthodologie juridique et éthique bien définie. 

D’abord, par le cadre : un retour immédiat à la légalité internationale pour parvenir enfin à cette paix introuvable qu’Israël prétexte ne pas y parvenir du fait du refus arabe de  reconnaître son existence. Ensuite, par un processus à démarrer concomitamment avec la mise en oeuvre des résolutions onusiennes, en plus des accords d’Oslo éventuellement. Il consistera en la mise en place d’un comité de sages israélo-palestiniens croyant en l’unité de la destinée sémite juive et arabe dont les racines remontent loin dans le temps en Palestine. Il agira ainsi, en parallèle des négociations politiques et techniques, à entrevoir la viabilité d’un État binational judéo-arabe multiconfessionnel et surtout démocratique.     

Oser proposer l'État binational 

Assurément, une telle initiative, aussi révolutionnaire qu'utopique en apparence, sera bien plus efficace que de se limiter à faire montre de son opposition à une existence patente dont la négation de l’évidence est sans intérêt. Tout comme de persister à qualifier un État formellement reconnu en droit et en politique de simple entité au lieu d'agir à démontrer et ses faussetés avérées et ses turpitudes flagrantes. Par contre, opter pour la démarche proposée, c'est aussi administrer la preuve que tenir compte du réel et agir en conséquence ne signifie pas ne pas être judicieux et novateur dans son action, en phase avec les valeurs défendues qui sont censées être celles de tout le monde.

C'est bien en quoi consiste le fait d'avancer une solution juste autre que celle des deux États jumeaux monozygotes, préconisée par l’ONU et qui s'est révélée une impasse. En effet, elle n’a permis ni l’instauration de l’État de Palestine, au même moment de celle de son supposé jumeau, l’État d’Israël ni la réalisation de la paix entre les diverses communautés de cette terre de Palestine qui n’est pas sacrée que pour les juifs et les musulmans, mais aussi pour les chrétiens. 

Aujourd'hui, agir efficacement pour le triomphe de la paix pour tous en Palestine, et tout en rappelant la nécessité du retour à une légalité internationale sciemment tue, occultée ou oubliée, c'est tenter aussi de la réinventer. Et il n'est pas de meilleure solution à proposer que celle d'une « Palestine binationale » déjà ancienne, ayant été préconisée par des justes de voix tant Arabes que juifs, comme la politologue Hannah Arendt qui était pour un seul État Israël-Palestine ayant Jérusalem en capitale commune.  

Avec la recrudescence chez les deux protagonistes des marques haineuses de nationalisme exacerbé et de religiosité intégriste sanguinaires, outre les violations de l’idéal démocratique de part et d’autre, ce sera une preuve tangible de leur sincérité à vouloir la paix et à croire au vivre-ensemble nonobstant leurs différences culturelles et cultuelles. Ce sera aussi la garantie sérieuse pour une démocratie véritable, non de pur slogan ou menacée de verser dans la dictature comme ce qui se passe en cet Israël supposé être jusqu’ici le plus respectueux de la démocratie. La contestation populaire qui ne cesse de s'élargir dans le pays contre les réformes antidémocratiques du gouvernement Netanyahu l'a amplement démontré.    

Être juste de voix et de voie

Il ne suffit donc pas de faire montre de sa solidarité avec le martyr des Palestiniens, faut-il ne pas se comporter comme leurs bourreaux qui vouent aux gémonies tous ceux qui ne sont pas de leur côté à supporter leurs excès, abus et turpitudes ; ce qui finit en crimes de guerre et contre l’humanité comme l'actualité dramatique offre à voir. 

Certes, dénoncer l’innommable est nécessaire et salutaire, mais agir concrètement à le faire cesser est bien plus utile et plus salutaire encore. C'est être juste de voix et de voie ; et l'être pour le salut de tous, non des seuls siens, relève de la vaillance et de la fortitude. Car alors on agit pour un monde d'humanité, une mondianité selon mon néologisme ; ce qui fait cruellement défaut et est source des misères actuelles d'un monde humainement à la dérive.

Or, c’est bien d’héroïsme, de force morale et de fermeté d’âme que nous manquons en des temps où l’on se suffit volontiers de slogans creux cachant la banqueroute faite dans le même temps aux valeurs dont on se réclame et qu’on ne concrétise point.

Que la Tunisie s’honore donc de vouloir être ce juste de voix et de voix, incarner la parole de justesse dans le ramdam des faussetés alentour et ne cédant point aux sirènes du vain populisme. Car d'aucuns y ont encore tendance à réagir selon les standards de l’ordre moral et juridique de la dictature qu’on croyait forclos, ne reniant pas sa propension à gouverner avec son délire de l'impérative nécessité de police de la pensée. 

Ainsi ont-ils, dans la précipitation, proposé la loi sur la normalisation précitée qui ne servira en rien la cause palestinienne, sinon à une vaine propagande populiste. N'auraient-ils pas mieux fait de proposer une autre qui aurait aboli les lois les plus scélérates de la dictature et aussi de la colonisation afin de donner réalité au slogan récurrent de la souveraineté du peuple. Car seul un peuple digne te souverain est apte à défendre vraiment la souveraineté d'un autre qui en est dépourvu. Sinon, si lui même n'est pas vraiment souverain, ce qu'il fait s'avère n'être que slogans creux. N'est-ce pas le cas puisque les lois brimant le peuple en  niant ses droits et libertés basiques, ce qui faisait la réalité du régime de Ben Ali, sont toujours en vigueur ?   

De plus, pour un pays qui a été - et ce n’est pas rien - le premier à conseiller, par le courage de Bourguiba, la meilleure stratégie aux Palestiniens, mettant en garde contre l’illusion de se croire le plus fort ou de dénigrer l’autre, son prochain, il serait désolant de répudier une telle stature visionnaire pour s’aligner sur les positions des plus dogmatiques, participant – l'alimentant même - à la terrible confusion des valeurs en cours en renforçant, sans s'en rendre compte, la stratégie du pire des plus fous.   

Illustration
Toile de Neta Harari Navon, peintre israélienne : 
« From one bank of the abyss to another », 2011. 

* Cette tribune garde la date à laquelle elle devait être publiée, ayant été proposée, comme à l'habitude, à certains médias. 

Or, la parole de vérité exige encore et toujours le courage d'aller au-delà des inter-dits, en faire non pas ce qui est interdit, mais ce qui est inexprimé entre les dits de nos propos, surtout dans le métier de l'information devant être régi par ce que je nomme Infothique, l'info éthique. 

Et ce n'est rien d'autre que, tout simplement, le contexte et le sous-texte, ce qui existe bel et bien, mais qu'on préfère, pour une raison ou une autre, taire, occulter ou nier ; même en se pensant ou se présentant indépendant d'esprit, objectif de pensée.

Ce que je comprends sans l'approuver, étant adepte du courage de la vérité : la Parrêsia de la philosophie grecque (transcrite souvent par parrhêsia et parrhèsia), que l’on traduit habituellement par « franc-parler ». N'est-ce pas, en arabe : كلمة السواء ? 

Ce que je pratique dans le cadre d'un 
humanisme intégral pour une politique éthique, ma poléthique !