L'argent du beurre libyen
Un proverbe populaire bien pertinent, illustratif de la sagesse de la rue, impose la nécessité éthique et légale de ne pas vouloir le beurre et l'argent du beurre à la fois.
C'est ce qu'il importe de rappeler en notre époque matérialiste à l'extrême. Dans les événements qui agitent la Libye, c'est bien ce qu'il faut avoir en premier à l'esprit
Le beurre libyen
La Libye a été mise en cet état indescriptible de chaos par un Occident avide de ses richesses. Ayant supputé ne plus avoir assez à son avantage le ratio bénéfices/inconvénients avec l'ordre ancien représenté par la dictature Kadhafi, il a tout fait pour s'en débarrasser.
Rien ne l'a arrêté, même pas le péril d'installer durablement le désordre dans un pays qui n'intéresse que pour ce qu'il peut receler de profits juteux pour les affairistes. Or, le désordre peut être propice aux affaires.
Peu importe le peuple ! Peu importent les valeurs pourtant oriflamme trompeuse de la désinformation occidentale pour sa croisade libyenne. Rien ne résiste à la cupidité du Dieu Mammon aussi implacable que la cruauté du Dieu des religieux intégristes.
D'ailleurs, ils ne sont que les deux faces d'une même divinité, celle de la plus-value mercantile d'un côté, cultuelle et de religiosité de l'autre.
Aujourd'hui, l'Occident s'apprête donc à investir la Libye non pas tant au nom de l'ordre et de la mise au pas des extrémistes religieux, mais plutôt et en premier lieu de la protection de ses intérêts stratégiques. Qui pourrait en douter ou le lui reprocher ?
L'argent du beurre
S'il est inévitable pour les puissances du jour de défendre leurs intérêts et de ne penser qu'aux bénéfices égoïstes apportés à leurs États et peuples, il est inadmissible que les petits pays les y aident en allant dans le sens de leur rhétorique hégémonique.
Certes, il ne s'agit pour ces derniers que de faire la politique de leurs maigres moyens bien minimes; mais ils n'existent pas moins si l'on se garde de reprendre la logique inepte de l'adversaire.
En matière de conflit libyen, la Tunisie ne peut accepter la tropologie occidentale de lutte contre le terrorisme qu'on y opposant l'exigence impérative que cette lutte soit concrète en intégrant le terrorisme mental développé du côté de l'Occident.
Il s'agit de celui qui veut que les frontières restent cadenassées face aux jeunes Tunisiens qui ont pourtant fait et continuent de faire preuve de maturité politique, encourageant nombre parmi eux à verser dans le terrorisme faute de liberté de circulation, synonyme de reprise de l'espoir de vivre normalement comme les jeunes de leur âge.
La Tunisie doit donc faire un impératif catégorique de la demande de transformation du visa actuel en visa biométrique de circulation afin de garantir le libre mouvement des jeunes Tunisiens entre la Tunisie et l'Europe et l'Occident en général.
Ce sera bien la seule parade efficace de nature à faire diversion en amortissant le choc inévitable de ce qui sera interprété forcément comme une agression contre non seulement la Libye, mais aussi tous les pays du Sud, livrés à une arrogance occidentale au service de purs intérêts mesquins en violation des valeurs humaines. Or, la libre circulation est le premier des droits humains !
Elle doit aussi exiger une aide sérieuse à l'enracinement de la démocratie sur sa terre, devant commencer par un moratoire de sa dette en prévision d'une transformation en investissements.