10 décembre 2016 : quels droits de l'Homme, en Tunisie ?
Comme chaque année, la Tunisie célèbre, ce 10 décembre, la journée internationale des doits de l'Homme, proclamée en 1950 par la résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies 423 (V).1
La célébration de cette journée signifie l'engagement à promouvoir la Déclaration universelle des droits de l'homme comme étant un idéal commun à atteindre par toutes et par tous dans notre pays qui n'a pas manqué de la ratifier.
Or, que voit-on encore chez nous ? Il est des gens, non seulement de simples gens trompés du peuple, mais dans les élites au pouvoir, qui relativisent les droits de l'Homme en prétextant des spécificités culturelles ou religieuses pour limiter la portée des droits de l'Homme.
Droit à l'égalité successorale
N'a-t-on pas vu les musulmans vouloir se distinguer avec cette aberration de déclaration de droits de l'Homme en islam ? Et c'est une totale aberration, car l'islam est justice et il consacre les droits de l'Homme sans aucune spécificité qui serait particulière au musulman. Vouloir limiter avec un tel prétexte les droits humains, c'est tout simplement violer l'islam.2
Ainsi, chercher à limiter la parfaite égalité des sexes au nom de l'islam, comme de perpétuer l'actuelle anti-islamique inégalité successorale, c'est défigurer l'islam qui est, par essence, égalitaire. Il est criminel d'altérer ainsi l'esprit de l'islam en faisant montre de machisme au prétexte qu'il y a un texte formel en la matière.3
Pourtant, on sait que les textes du Coran sont éternels dans leurs visées, les préceptes de l'islam étant venus en phase avec les réalités du moment. Aussi, en dehors du dogme, tous les textes concernant la vie terrestre et les rapports humains sont appelés à évoluer en tenant compte de l'esprit du texte. Or, nul ne conteste que l'esprit de l'islam en matière successorale soit l'égalité parfaite, déjà sur le plan des principes, entre homme et femme.
Continuer à plaider l'islamité de l'inégalité successorale au vu d'un texte qui ne peut plus être appliqué aujourd'hui, c'est justifier la prétention de ceux qui oseraient dire qu'en islam il faut couper la main du voleur au nom justement d'un verset qui ne s'applique plus.
Un projet de loi existe au parlement et un autre texte a été proposé par la société civile;3 que le gouvernement ose faire passer l'un ou l'autre !
Droit à l'homosensualité
Il en va de même en termes de violation de l'islam de l'homophobie, notre foi n'ayant jamais été homophobe.4 Il n'existe aucun verset prescrivant de discriminer cette minorité qui a un sexe particulier, conforme au reste à ce qui existe dans la nature où le sexe n'est pas hétérosexuel, mais plutôt bi. Et c'est bien le type du sexe arabe et maghrébin.5
De plus, dans le Coran, il n'existe que des récits rappelant l'anathème sur ce que la Bible considérait comme étant contre nature et qui l'a condamné. Aussi, rejeter les homosensuels (c'est mon terme pour homosexuels), c'est appliquer la Bible et non le Coran!
Il est temps donc de cesser d'être judéo-chrétien et d'appliquer correctement l'islam, d'autant plus que tout ce qu'on rapporte comme hadiths au sujet d'une prétendue homophobie de la Sunna est faux; la preuve en est que ni Boukari ni Mouslem, les deux recensions considérées comme les plus authentiques, ne contiennent aucun hadith en la matière.
Il est désormais impératif de répudier la tradition judéo-chrétienne de notre foi et de notre législation - ce qu'on a appelé israilyat - en revenant au vrai islam nullement homophobe. Et comment le serait-il, notre religion étant la justice même ?
Un projet de loi de consensus tendant à abolir l'homophobie a été proposé;6 que le gouvernement le retienne et le fasse voter à l'Assemblée des Représentants du Peuple. Je rappelle ici que le chef du parti islamiste semble s'être déclaré prêt à abolir l'homophobie en Tunisie7 et que le parlement européen en a fait une condition, parmi d'autres, de son soutien pour la renaissance de notre pays.8
Une telle résolution, outre la logique et la bonne gouvernance, impose d'autant mieux la réforme légilsative9 à ce niveau qu'elle se traduirait au niveau mental par l'acceptation enfin du passage de la dictature morale à la démocratie qui est bien l'acceptation d'autrui et la reconnaissance de ses droits sans exclusion, surtout pas religieuse. Or, l'homosensuel est la figure emblématique du différent absolu.
Soyons donc patriotes en votant l'abolition de cette honte de l'homophobie qui est un héritage colonial,10 ainsi que de toutes les pratiques moyenâgeuses qui en découlent comme les tests de virginité ou anal !
Droit à toutes les libertés privatives
Reconnaître leurs droits aux gays relève du droit impératif du Tunisien, musulman ou non, à une vie privée libre des entraves idéologiques et religieuses. L'islam est liberté et non-religiosité, car il est d'abord une spiritualité qui ne s'oppose en rien à ce qui est naturel en l'homme, comme son droit au sexe libre du moment que cela se passe entre majeurs et consentants. Dire le contraire, c'est relever, non pas de l'islam, mais des religions judaïque et chrétienne.
Il n'est nul péché du sexe en islam; notre foi n'est pas pudibonde. Elle était même dénoncée pour sa supposée sensualité excessive. Or, l'Arabe et le Berbère sont bien sensuels, comme tous les Méditerranéens.11 Et si un tel trait a été gommé et altéré par la pastorale chrétienne, il est demeuré vivace dans nos peuples grâce justement à leur foi islamique sous les traits de véritable islam populaire qui est le soufisme.
Or, l'islam soufi est libertaire ! Pour le vérifier, il suffit de se rendre aux fêtes des saints soufis ou de redécouvrir leur vie. Et ils étaient de parfaits musulmans, des femmes et hommes parfaits !
Il est temps donc qu'en Tunisie les lois restrictives des libertés privées en matière sexuelle entre adultes consentants, ou en matière de consommation du cannabis, dont la nocivité est moindre que la cigarette tolérée,12 ou de l'alcool13 soient enfin abolies. Et ce ne serait que pour commencer, amorcer la pompe, comme on dit.
Pourquoi donc ne pas le faire afin de célébrer cette journée mondiale des droits de l'Homme. Il suffit que le président de la République le dise et les lois suivront Pourquoi donc ne pas le faire afin de célébrer cette journée mondiale des droits de l'Homme? Il suffit que le président de la République le dise et les lois suivront, ayant été prouvé que les islamistes ne tirent leur supposée force que de la démission des démocrates !14
Sortir de l'immobilisme islamiste
On attend un tel geste de nos autorités afin qu'elles finissent enfin par pratiquer la politique éthiquement, une poléthique ! Cela veut dire une politique respectueuse aussi bien de la légalité constitutionnelle que de la morale islamique, la vraie et non cette caricature judéo-chrétienne.
Et on n'a plus le droit de tergiverser à sortir de cette fausse foi maintenant que le plus grand soutien des islamistes, l'ami américain, a changé de direction. Il est, en effet, sûr que la nouvelle administration Trump sera moins conciliante avec nos dogmatiques que l'ancienne.15
C'est qu'ils sont désormais assurés que leurs intérêts stratégiques sont mieux servis par le vrai islam soufi, aussi respectueux de la religion du peuple que de la philosophie libérale, et ce non seulement en termes économiques, mais également et surtout en termes de droits et de libertés.
L'islam politique s'il doit avoir un avenir en Tunisie doit être en phase avec la mentalité populaire qui est hédoniste; ce qui est bien plus conforme à la mentalité américaine que ce qu'en donnent à voir nos religieux intégristes.
Qu'ils osent enfin changer leur mentalité pour espérer garder leur pied à l'étrier du pouvoir ! Ils savent bien ce qu'il leur reste à faire tant qu'il est encore temps. Qu'ils engagent de suite la réforme législative impérative dans le pays avec, pour commencer, les textes en matière des droits et libertés ci-dessus évoqués. Cela servira tout autant leur légitime ambition de demeurer sur la scène politique que les exigences populaires à plus de dignité.
NOTES
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