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mardi 6 septembre 2016

Jeune Tunisie 7

Que Messieurs Essebsi et Ghannouchi tiennent donc leurs promesses !



Le parlement est en réunion exceptionnelle pour un train de lois à voter. Certes elles sont toutes intéressantes, mais aucune n'a la capacité à permettre de faire évoluer vraiment la démocratie en Tunisie.
En effet, si tout le monde s'accorde à dire que l'État de droit est dans ses lois justes, personne ne peut contester sérieusement que les nôtres ne le sont pas toutes, étant encore pour une bonne part celles de la dictature et du protectorat.
Et tout le monde sera bien d'accord pour dire que ce qui fait le plus mal au pays est l'inertie de ses acteurs politiques sur les questions sensibles objet de telles lois qu'on ne veut abolir contre ce qu'exige la plus élémentaire des gouvernances !
S'attaquer aux tares de la société et de sa législation
Or, il est un domaine où des tares avérées du droit tunisien et donc de la société peuvent et doivent être rapidement levées : celui des droits et des libertés privées. Surtout qu'on ne peut plus accepter que la jeunesse tunisienne souffre le martyre de ne pouvoir vivre en toute liberté ce qui ne regarde personne.
Il est donc impératif de la part d'un gouvernement dont la mission majeure est de rétablir la confiance dans le pays entre l'État en crise et une société de plus en plus remuante à bon droit, d'agir au plus vite sur le plan législatif, là où l'action rapide est possible et est porteuse de retombées bénéfiques sur l'imaginaire et l'inconscient populaire.
D'autant plus qu'il existe deux promesses dans deux domaines sensibles où, d'une part, la souffrance des jeunes est à son comble - c'est le cas de la pénalisation du cannabis -, et d'autre part est à haute teneur symbolique, étant en mesure de dépolluer les mentalités d'une pernicieuse lecture faussée de l'islam - c'est la question de la honteuse homophobie.
En effet, que ce soit de la part du président de la République que du tout puissant chef du parti islamiste, une promesse existe de dépénaliser le cannabis et abolir l'homophobie en Tunisie. Qu'ils tiennent chacun sa promesse, osant dire le vrai en la matière et faisant taire les minorités intégristes ! Ils contribueront efficacement à l'assainissement de la situation sociale et à la consolidation de l'État de droit qui n'est rien sans société de droits et de libertés.
Dépénaliser aujourd'hui le cannabis, qui n'est un fléau que du fait de sa pénalisation en violation du bon sens et des réquisits sanitaires, et abolir l'homophobie, qui est une violation caractérisée de la constitution et de l'islam, c'est engager rapidement l'oeuvre inévitable de transformation du pays. Une transformation qui sera d'autant plus utile qu'elle s'attaquera à la racine au mal tunisien qui n'est rien d'autre que ce mental antidémocratique, terroriste même, refusant le droit à la différence. 
Enlever les blocages antidémocratiques des mentalités
Ne nous leurrons pas ! Tant qu'on n'aura pas fait le nécessaire au niveau des fondations, rien ne tiendra dans le pays qui prétend se moderniser à coup de projets ignorant superbement ce qui compte vraiment. Car les projets de lois actuellement en discussion ne sont que comme des murs qu'on élève sur des fondations à refaire, n'étant plus sûres. Rien ne tiendra !
C'est le vivre-ensemble qui est bancal en Tunisie; et il nourrit un mental terroriste, refusant le droit à l'altérité; il doit donc être refondé au plus vite pour espérer avancer. Et cela ne se fera pas par des lois se limitant à s'attaquer au harcèlement des femmes, cherchant à encourager l'investissement dans le pays ou à rationaliser la votation aux élections ! Tout cela est utile, mais secondaire, car il s'insère dans une législation scélérate qui le vide de toute effectivité, augmentant le malaise dans la société.
Comment donc espérer un État de droit avec des lois illégales et illégitimes? Comment vouloir une société de droits bien gouvernée sans libertés du fait même des lois en vigueur, pourtant devenues illégitimes, ayant été abolies par les acquis de la constitution?   
Tant au niveau des droits de la femme — qui doit être juridiquement reconnue l'égale de l'Homme en tout, y compris en matière successorale — que des jeunes — dont les majeurs doivent librement consommer, y compris sexuellement, ce que bon leur semble —, il importe de consacrer au plus vite les droits impératifs à une vie privée enfin libérée du diktat des autorités, tant politiques que religieuses.
Il y a urgence de mettre un point final à la dictature morale et légale exercée illégitimement sur une société devenue libre et ne pouvant plus être gérée par des lois obsolètes ni une mentalité archaïque.
Et il n'est pas mieux pour satisfaire à une telle urgence impérative que de commencer avec les deux questions évoquées ici, au symbolisme salvateur à tous les points de vue, dont la morale de nos dirigeants et leur capacité à tenir parole. Que reste-t-il donc de l'honneur du politicien s'il ne tient pas la parole donnée ?   

Publié sur Al Huffington Post