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I-SLAM : ISLAM POSTMODERNE








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mercredi 9 septembre 2015

Pour la démoarchie 3

Fin des élites et faim de nouvelle épistémè (3/3)


Ce qu'est la crise mondiale
En notre époque nouvelle, la postmodernité, une synergie entre l'archaïque et le technologique est de rigueur ; elle impose la naissance de la nouvelle épistémè dont je parle pour l'intelligence des affaires humaines. Il nous faut par conséquent prendre conscience qu'on ne peut plus raisonner ni même agir de nos jours sur un strict plan local ; il est impératif de se résoudre à s'inscrire dans un plan régional pour le moins sinon mondial.
Bien évidemment, cela ne signifie point la perte de toute attention à ce qui relève du local et de la proximité humaine qui est à multiples dimensions, aussi bien culturelle, économique et politique que sociologique et psychologique. De fait, il s'agit d'un équilibre instable et impératif à trouver.  
La postmodernité invite donc l'État en crise, pour échapper à l'obsolescence,  à se transformer en collant plus aux exigences des masses qui ont repris le pouvoir, la puissance sociétale instituante ayant supplanté subrepticement le pouvoir institué, quelle que soit sa forme.
C'est ce qu'on qualifie de passage de la notion classique de contrat à celle de pacte bien plus en prise avec les attentes des foules seules détentrices de la légitimité qui ne saurait aujourd'hui qu'être réelle, incarnée et de tout instant, quitte à être renouvelée constamment par les instruments de ce qu'on appelle démocratie directe.
Au paradigme politique nouveau en gestation, il nous faut trouver les mécanismes formels adaptés pour renouveler une démocratie exsangue, vidée de son âme, devenue un cadre formel sans sens, une structure idéale pour la légalité apparente trouée d'illégalités multiples et récurrentes. On ne peut plus de nos jours, sauf à faire preuve d'angélisme ou de mauvaise foi, se contenter du rendez-vous électoral comme unique et éminente incarnation de la légitimité politique; en postmodernité, elle ne recouvre plus nécessairement la souveraineté populaire.
Cela se pouvait et devait l'être avec notre ère de communication à outrance où les distances se sont raccourcies au point que le village planétaire d'hier est réduit désormais à juste un immeuble aux dimensions du monde.
Ce que mande la crise mondiale
Dans cet immeuble planétaire, on ne peut plus se passer de  syndic ni lui déléguer — surtout pas indéfiniment — une mission nécessairement limitée et liée de représentation des habitants qui sont de plus tous propriétaires. Outre le droit de le révoquer à tout moment, en choisir un autre, ils gardent celui de provoquer des réunions n'importe quand s'il y va de l'intérêt de l'immeuble. En cela, tous les habitants sont égaux d'une égalité absolue. C'est ainsi qu'il nous faut désormais voir les choses du monde, et non de la façon obsolète du passé.
C'est de cela qu'il s'agit aujourd'hui en notre monde en crise, cette saturation d'une forme ancienne du politique imposant la nécessité d'une pratique nouvelle, un paradigme issu d'une vision des réalités qui soit inventive tout en étant plus humaniste et véritablement solidaire.
Fatal est donc le passage de la conception désincarnée actuelle de la mondialisation à une vision incarnée de notre univers dont l'altermondialisation a déjà brossé les contours. Pour ma part, j'en qualifie la manifestation par le néologisme de mondianité, contractant les termes monde et humanité, ce dernier faisant le premier, étant son esprit ou son âme.
En effet, sans le souci pour le sort de l'humanité, le monde est comme un corps sans vie ; et il n'est que temps de réinsuffler la vie en ce monde déshumanisé du fait de ses dérives matérialistes à outrance.
Et la Tunisie est bien placée pour en donner le modèle futur. Car elle est à cheval entre un Occident triomphant, mais sur le déclin, et un Orient qui fut moderne avant la lettre (c'est ce que j'ai nommé rétromodernité) et qui est de retour désormais à travers les retrouvailles avec ses valeurs et sa riche spiritualité.
Ce que mande la crise en Tunisie
La proximité ouverte au large est aussi, chez nous, une étendue implantée en un terroir ; elle est ce qu'on peut appeler un dynamisme enraciné ou un enracinement dynamique. Elle suppose, au niveau politique, la refondation de la philosophie même de l'État, le retour à l'État providence en passant de la notion classique vidée de tout sens du contrat social à celle de pacte émotionnel.
Qu'est-ce qui a fait la valeur de la conception classique de l'État sinon le contrat dont il est l'émanation et la consécration ? Celui-ci suppose l'égalité des parties contractantes et la compensation par une plus grande liberté garantie du désistement à une minorité de sa liberté par la majorité. Car cette minorité de serviteurs est devenue des servis, une cohorte de professionnels de la politique, des démons faisant de la chose politique une daimoncratie.
L'État classique est devenu une entité à part, déconnectée des intérêts de ceux qu'il était censé servir, au seul  service d'une minorité de privilégiés s'arrogeant le droit de l'incarner. C'est le Léviathan que l'ère actuelle des foules ne peut plus accepter ni s'en accommoder.
En Tunisie, toujours en pleine anomie révolutionnaire, rien n'interdit aux responsables d'adhérer au modèle économique occidental qu'on lui impose volens nolens ;  il leur faut juste aller au bout d'une telle logique supposant de demander concomitamment l'adhésion de la Tunisie au système politique démocratique qui y a cours.
Cela impose toutefois une transfiguration de la conception du politique en Tunisie comme dans le monde, en Europe plus particulièrement. Et s'il le faut en Tunisie d'abord, mieux outillée aujourd'hui pour donner l'exemple, sortir d'un monde fini auqul elle n'a jamais appartenu.
Ce qui suppose surtout une pratique, tant politique que religieuse, enfin libérée du carcan obsolète d'une fausse interprétation de l'islam et de la chose publique qui en fait une religion obscurantiste pour le premier et, pour la seconde, une religion civile dogmatique et intégriste profane.
Or, le dogmatisme est une banalisation du mal; c'est du pur terrorisme mental, le plus périlleux qui soit, faisant le lit du terrorisme mineur qu'est le terrorisme physique.

FIN


Publié sur Al Huffington Post


Article repris en une seule partie 
et sans la paragraphe final 
sur Contrepoints sous le titre :