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samedi 23 juin 2018

Diplomatie de l’islam 8

Parler autrement des libertés individuelles en islam
  


Les autorités marocaines ont interdit un colloque international sur les libertés individuelles qui devait se tenir à Casablanca du 22 au 23 juin, et ce manifestement de peur d’irriter les intégristes, du moins selon Nourredine Ayouch, président du collectif organisateur Démocratie et libertés (CDL). Or, il affirme ne pas renoncer à sa manifestation et entend l'organiser, en précisant aborder autrement les choses.



La peur de sujets sensibles



On ne sait si cela porte sur la présentation et le traitement des questions à débattre ou juste les formalités y relatives qui ont été invoquées pour l’interdiction.



Il est à noter que l’interdiction a été précédée par une série de désistements de la part des personnalités pressenties pour y participer ainsi que le refus de la fondation du roi Abdul-Aziz Al Saoud qui devait l’abriter en ses locaux. Même l’hôtel pressenti pour la remplacer s’est finalement désisté.



Parmi les invités qui ont fini par refuser d’honorer de leur présence l’ouverture du colloque figurent le ministre de la Justice et le secrétaire général du PPS  



Le Maroc ne serait-il donc pas encore prêt à un débat sérieux et décomplexé sur les libertés individuelles comme l’ont pensé d’aucuns? Parler de la liberté de culte, du droit de disposer de son corps et de sa sexualité, est-ce vraiment tabou au Maroc ?



On invoque surtout le fait que le colloque entendait ne pas traiter de façon juste générale des libertés, allant jusqu’à évoquer des questions sensibles, jugées difficiles politiquement à assumer, car supposées marginales et polémiques 

Si, comme l’assure l’organisateur, c’est la « peur des conservateurs » qui a amené en cascade les annulations, il faut croire que la manière de traiter ces sujets sensibles a compté aussi.

Au vrai, sur ces questions jugées délicates, car relevant encore du non-dit et des sujets tus, c’est la manière d’en parler qui importe; or, le tort de la plupart des militants humanistes est de ne pas prévoir d’en parler du point de vue islamique sans en rien céder, toutefois, à leur radicalité humaniste.

Parler autrement du sensible

Nos militants maghrébins sont, pour la plupart, marqués par un esprit français qui ne peut servir au Maghreb du fait qu’il se veut laïque quand il n’est que laïciste.

On veut alors se suffire de parler de la légitimité des libertés privées du point de vue civil, sans les justifier également et surtout du point de vue religieux. Or, cela est parfaitement possible sans rien renier à ses valeurs. C’est même juridiquement impératif, car les constitutions maghrébines, la marocaine surtout, imposent de tenir compte des valeurs de l’islam.

De plus, quel mal y a-t-il d’évoquer la légitimité de disposer de son corps ou d’avoir des relations homosexuelles au nom de l’islam puisqu’il a été bien démontré que cette religion est pour la liberté sexuelle du fidèle et n’a jamais été homophobe ?

Il est vrai que les intégristes et la majorité des musulmans pensent le contraire, mais c’est la faute d’une fausse vérité qu'il est possible aujourd’hui de défaire en rappelant que sa fausseté a été démontrée et ne fait plus de doutes. Il suffit juste d’avoir le courage d’en parler. C’est ainsi qu’on pourra sortir ces sujets de la sphère du tabou qui défigure l’islam tout autant que le droit marocain.

Assurément, parler ainsi dans le colloque des libertés individuelles, sans heurter inutilement les conservateurs, mais en leur faisant face de front avec leurs propres arguments religieux, retournant en quelque sorte leurs armes contre eux, c'est aider à mieux informer les masses sur leur foi véritable. Et c'est de la sorte qu’on sortira de la confusion des valeurs dans laquelle on patauge actuellement faute à la fois de courage et de parler autrement de telles questions.

C’est bien le défit à relever en premier par les militants qui ne doivent plus se comporter comme les intégristes qu’ils dénoncent en faisant montre tout autant de dogmatisme, mais laïciste cette fois-ci, non religieux. C’est ce que je qualifie de salafistes profanes.

Or, il tombe sous le sens qu’on ne pourra sortir de l’impasse actuelle sur les droits privés en islam sans avoir l'audace et l’honnêteté de dire que cela n’a jamais été interdit par l’islam et que le combat des libertés se doit d’être mené en son nom, en tant que foi de droits et de libertés. C’est cela être un intellectuel organique.

On espère que c’est ce qu’a entendu dire M.  Ayouch en évoquant une autre manière d’évoquer les sujets prévus par le colloque qu’il tient nolens volens à organiser ? Ce ne sera que tout bénéfice pour tous, surtout pour la cause des libertés privées, que d’en parler autrement, rompant enfin avec la stratégie qui a prévalu jusqu’ici et qui est inspirée, sinon imposée, par certaines ONG occidentales trop marquées par leur propre histoire, quand elles ne s’adonnent pas tout simplement, implicitement ou inconsciemment, à une islamophobie primaire. 

Publié sur Huff Post