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jeudi 14 juillet 2016

Justesse de voix et de voie 2

Pour une politique fondamentale




Les péripéties actuelles de la gouvernance en Tunisie : passe d'armes entre l'ancien et l'actuel président de la République et la position du chef du gouvernement ne souhaitant pas se démettre, pose le problème du fondement moral de la politique, nécessitant qu'elle soit enfin fondamentale. Quèsaco?

Refonder la politique

Dans le Savant et le politique, un classique des sciences sociales, Max Weber parle de la vocation du savant et de celle du politique et théorise le concept de la neutralité axiologique fondement du rapport à l'objet du chercheur en sciences sociales.

Dans le sillage de Weber, mais en termes de pratique politique, je parle quant à moi d'impératif axiologique que je résume par le néologisme Poléthique, une politique éthique.

Qu'est-ce à dire sinon l'abandon de la culture politique en son dogme même d'alliage réussi de la ruse du renard et la force du lion. Avec la fin de la modernité et l'entrée en cette postmodernité qui est l'âge des foules incontrôlables et incontrôlées, il importe de s'adonner à une sorte de politique fondamentale comme on dirait de la recherche.      

Comme l'épistémologie de la science moderne en Occident, une science qu'on a qualifiée d'empirico-positiviste, marquée par l'importance excessive du matériel, celle de la politique est positiviste à l'excès aussi du moment qu'elle ne tient pas compte des symboles politiques qui sont équivalents aux symboles humains et qui se révèlent être les vrais fondements culturels des décisions politiques et leurs manifestations économiques, financières et idéologiques.

Ainsi, la science empirico-positiviste est-elle indifférente aux aspects subjectifs et cognitifs dans les comportements humains, limitant le champ d'investigation de la science aux phénomènes tangibles et quantifiables, se désintéressant de ceux qui sont à leur source et qui relèvent de ce qu'on appelle désormais l'imaginaire.

Pareillement, on a fait rétrécir la marge de manoeuvre des politiques nationales par la conception positiviste dictée par le positivisme occidental qui n'a rien de véritablement scientifique en définitive.    

Une politique rationnelle

On parle de recherche fondamentale pour le chercheur scientifique pour dire la nécessité qu'il a de cerner le fond des choses afin d'être en mesure d'identifier les bases latentes ou occultes derrière les aspects manifestes des phénomènes.

Ainsi, en sciences, la recherche fondamentale est le moyen de saisir au plus près le sens des manifestations empiriques, des phénomènes étudiés. C'est ce qui permet d'élaborer un cadre théorique base de toute avancée scientifique.

De la même manière que la connaissance scientifique, la pratique politique se doit désormais d'avoir une activité et une démarche similaires, muant en politique fondamentale.

Une politique, sociale qui plus est, n'est plus crédible si elle ne repose pas sur une fondation théorique que lui fournit la prise en compte des aspects qui sont le champ même de la recherche fondamentale; c'est la politique fondamentale qu'impose la réalité sociopolitique d'aujourd'hui, une nouvelle épistémologie au diapason de celle qui fait passer la sociologie en socialogie ainsi que nous y avons appelé.*   

Une politique de la postmodernité

Appeler ici à une politique fondamentale, c'est rappeler l'importance du cadre théorique référentiel pertinent nécessaire pour une interprétation et une compréhension adéquates des comportements des acteurs politiques au sein des dynamiques des sociétés tant nationales qu'internationales et leurs interdépendances. 

Si, en sociologie contemporaine, l'accent est désormais mis de plus en plus sur la culture et l'importance de la culture ou encore plus récemment sur les symboles humains, ainsi qu'y exhorte le sociologue tunisien Mahmoud Dhaouadi, c'est la dépendance mentale qui s'y substitue en socialogie et en politique éthique ou poléthique.

Cela veut dire que la dépendance mentale, qui est forcément culturelle, est le concept à privilégier désormais par rapport à celui trop galvaudé de sous-développement. On sait, au demeurant, qu'on a pu dire, à raison, qu'il n'y a pas de pays sous-développé, mais juste des pays sous-analysés.

Comment donc les pays peuvent-ils être analysés correctement et avec pertinence quand ceux qui les analysent usent de concepts inadaptés, forgés par et pour les sociétés dominantes, perpétuant consciemment ou inconsciemment de la sorte sa damnation.

Car tout est dans le mental et l'imaginaire, un système de dépendance culturelle symbolique, que le symbole humain soit  langage, religion, idéologie, technologie et finance ou même juste de l'information et même une mode. Tout cela formate, agissant selon la technique de Procuste.  
  
Ils sont les plus grands marqueurs de la dépendance humaine, notamment du Sud par rapport au Nord. Aussi, aucune politique ne peut plus être indépendante et ne saurait réussir en dehors de la tenue en compte de ces variables qu'impose le système mondialisé en postmodernité, notre époque. 

Une politique de la mondialisation

C'est ce dont permettrait de rendre compte une politique fondamentale. Par exemple, le commerce est une donnée incontournable aujourd'hui pour un pays comme la Tunisie; ce serait faire du donquichottisme que de refuser de s'y plier; mais appeler à un commerce humain permettrait d'avoir une chance de ne pas devoir passer sous les fourches caudines du néolibéralisme sauvage sans compensation. C'est cela faire la politique fondamentale.

Aujourd'hui, il est inutile de singer les recettes obsolètes de l'Occident, comme de parler d'union nationale qui ne fait pas de sens dans un pays où l'on ne peut même pas savoir faire l'union autour des valeurs de la Constitution.

Aussi, ce qu'il y a de plus essentiel et central dans la politique, eu égard à sa réalité mondialisée, c'est de cesser d'user de concepts périmés qui ont épuisé toute pertinence avec la fin du monde ancien.

Continuer à se comporter ainsi revient à agir comme si l'on n'avait que le coeur pour régir notre corps, alors qu'il ne saurait se passer du cerveau. Ils sont certes les deux principales forces derrière l'action humaine; mais s'il faut tenir compte du coeur, l'arbitre orientant et déterminant une telle action demeure le cerveau.

Or, comme pour le corps humain, c'est dans le cerveau que s'élaborent les symboles humains et qui n'est évident que par la pratique d'une politique fondamentale permettant de se situer au plus juste à son exacte place du système mondial, juste un abacule dans une mosaïque.

En effet, si le coeur est la politique nationale interne, toujours importante, le cerveau est la politique internationale présente dans la politique interne qui implique donc les rapports entretenus par les acteurs de la politique nationale avec les partenaires obligés ou voulus de la scène internationale de laquelle on dépend nolens volens, parmi lesquels il y a de plus en plus des gourous financiers.

Au final, il n'est nulle politique crédible aujourd'hui si elle n'accorde pas son importance à l'aspect culturel en tant que symboles humains et ce de manière au moins équivalence sinon plus importante que tout autre critère, dont notamment la politique économique du pays. C'est cela s'adonner à la politique fondamentale.                    

Aspects concrets d'une politique fondamentale

Pour revenir à la situation actuelle de crise de la gouvernance, donnant des exemples concrets de ce que pourrait être la politique fondamentale dont on parle.

D'abord, sortir de l'inertie actuelle qui marque nos gouvernants; on sait à quel point, en stratégie militaire, elle est mortelle ; or, l'art politique et diplomatique est encore plus exigeant que l'art militaire; c'en est même la quintessence. 

C'est ce qui est reproché au gouvernement Essid. Certes, ce n'est pas de la faute du chef du gouvernement, on l'a déjà dit ici,** mais il n'est plus l'homme du moment qui impose que l'on bouge tous azimuts afin de faire diversion de nos risques et secouer le cocotier de la crise.***

J'ai déjà parlé, par exemple, d'une politique que j'ai nommée arc-en-ciel****. Que ce soit celle-là ou une autre, il est impératif de prendre des initiatives aussi bien sur le plan interne qu'international.

Sur le plan national, cela doit être la réforme législative audacieuse dans le seul domaine ayant des retombées utiles et concrètes de nature à faire bouger les choses, car agissant sur l'inconscient et le mental et c'est en abolissant nos lois iniques, scélérates même.

Je me limite à rappeler ici les mesures symboliques cassant le faux lien entre religion et politique, ce qui consacrera le principe constitutionnel de l'État civil : nécessité sans plus tarder d'instaurer l'égalité successorale, d'abroger l'homophobie et de dépénaliser la consommation d'alcool et de cannabis. C'est de consécration de l'égalité entre citoyens et de leurs droits à une libre vie privée qu'il s'agit !

Sur le plan international, entre autres actions urgentes, il importe d'exiger le libre mouvement des ressortissants tunisiens sous visa biométrique de circulation, liant l'inévitable libre-échange de marchandises à la libre circulation humaine.

Cela doit être demandé haut et fort par l'État tunisien tout autant qu'un moratoire de la dette scélérate qui plombe le moindre effort sérieux pour sortir de la crise, et ce en prélude à sa fatale annulation.

Et comme il faut repartir sur des bases saines, la Tunisie doit exiger (le terme n'est pas fort) un plan Marshall en sa faveur, car elle est dans la situation de l'Europe à l'issue de la Seconde Guerre mondiale et il est évident qu'elle ne peut s'en sortir avec les supposées aides actuelles.

Surtout, elle a droit que l'on reconnaît la fière contribution de ses citoyens qui a été déterminante dans la défense de la liberté de l'Europe et la renaissance de son économie. Outre leur sang versé dans une guerre qui n'était pas la leur, les Tunisiens se faisaient  emmener en Europe par charters entiers de Tunisie. Et voici qu'on oublie ce passé, expulsant aujourd'hui les enfants des maçons de la prospérité de l'Europe.

M. Khemaies Jhinaoui, ministre des Affaires étrangères, a bien dit, lors de sa visite en France, que le soutien européen à la Tunisie « n’est pas conséquent » et « ne répond pas à ses besoins » et qu'un « échec de la transition tunisienne aurait un impact dévastateur» .*****
Il est bien en droit aujourd'hui d'user de moins de diplomatie et de tact en demandant que l'Europe et la France donnent enfin son dû à la Tunisie. Car on n'a pas assez profité et profite encore d'elle et de son peuple; il est temps de le rappeler !

NOTES
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Publié sur Al Huffington Post