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dimanche 22 novembre 2020

Espace francophone de démocratie 4

   
État composite 
et 
espace méditerranéen de démocratie

 

Plus que jamais, l'État national en Tunisie doit évoluer vers ce que j'appellerais État composite, reprenant l'expression de Paul Pascon pour les sociétés maghrébines, marocaine plus particulièrement. L'État composite est la physionomie de l'État postmoderne, aux formes plurielles, antagonistes même, travaillé par des rapports de forces accentués, inégalitaires, mais complémentaires et inévitables. Cela le force à un continuel ajustement aux intérêts des masses, une adaptation aux exigences du plus grand nombre. C'est ainsi que l'État du nouvel ordre mondial en construction, surtout au sud de la planète, assumera et reflètera la diversité intrinsèque du réel s'imposant mondialement, esquissant les linéaments d'un futur gouvernement mondial qui soit composite aussi. Et ce sera, s'agissant de la Tunisie et plus tard de tout le Maghreb, dans le cadre d'une union avec l'entité politique de droit effectif qui est à ses portes, l'Union européenne.   

Il est vrai, l'Europe est actuellement en crise, mais c'est le fait du monde tout entier. C'est notamment du fait que sa vision de l'univers, qui a bien changé, est obsolète. Aussi, une future ouverture à la Tunisie, et plus généralement aux pays du sud de la Méditerranée accédant à la démocratie, lui permettra assurément de refonder ses structures dépassées et sa conception antique des réalités du monde, lui donnant une nouvelle ambition. Comme un nouvel ordre au monde est en gestation, l'ancien étant périmé, il importe de s'en rendre compte et d'y agir en réclamant ou même favorisant sa mise en œuvre sur de nouvelles bases qui ne peuvent être celles du siècle dernier. Car la mondialisation ne peut se limiter à une globalisation des intérêts des plus puissants, muant plutôt en un partage dans une solidarité réelle, un monde d'humanité, une mondianité.   

C'est d'autant plus impératif que le commandent les troubles qui se multiplient dans le pays du bas de l'échelle de la société au plus haut niveau de l'État. Certains n'y voient que la déliquescence de l'État comme autorité centralisée, n'ayant  en vue que la notion dépassée de ce dernier ; or, la véritable autorité de l'État bien structuré est celle de son peuple. C'est la confiance de celui-ci dans ses responsables — et non irresponsables — qui fait l'autorité de celles-là. De fait, ce qui se passe en Tunisie est la manifestation brute d'une mauvaise façon de gouverner, quoique répandue de par le monde, reproduisant les conflits de puissants intérêts soutenus par des puissances intouchables. C'est toujours un symptôme annonciateur d'une fatale issue à la crise à la fois de l'État contre la société et de la société contre l'État. On assiste, d'un côté, à une partie du bas peuple qui prend le pouvoir là où elle le peut, dans le sud déshérité en l'occurrence. De l'autre, aux rapports de pouvoir au sommet d'un État déconnecté de la société où tous les coups bas sont permis, ce qu'encourage l'État de similidroit avec ses lois scélérates et illégales autorisant toutes les drives en foire d'empoigne, opéra bouffe de la politique politicienne.

Pourtant, en Tunisie, l'autorité de l'État ne peut plus se réduire à celle des minorités privilégiées au pouvoir ; cela y est de moins en moins possible. On le mesure bien avec la multiplication de centres de décision et de maffias diverses. Ce qui est malsain, mais pas plus que ce dont souffrait le pays sous l'ancien régime. Cela serait même plus sain s'il devait hâter l'inéluctable évolution des moeurs politiques, au diapason de celles de la société, dans le sens d'une décentralisation véritable du pouvoir et d'une plus grande autonomie pour les régions et les localités, ce qu'on nomme démocratie participative. Là où le bât blesse, c'est que les forces agissantes dans le pays au nom des principes ci-dessus rappelés nourrissent la même vision autoritaire du pouvoir que les forces contestées : une conception manichéenne des choses, une instrumentalisation de la colère légitime des populations pour des revendications politiciennes et idéologiques dogmatiques, et surtout le rejet de l'État de droit au sens d'État ayant des institutions indépendantes, mais dans un cadre de vraie légalité juste et légitime. Or, un tel État de droit n'est pas encore envisageable en Tunisie. Il ne le serait que si le pays venait à être articulé à un système en place, ayant fait ses preuves en matière de droit souverain, soit celui de l'Union européenne, entité politique la plus proche du pays où la légalité n'est pas trop trouée d'illégalités. Car l'État parfait de droit n'existe pas, on le vérifie actuellement avec ce qui se passe dans les pays dits démocratiques.

Pour sortir de sa crise, la Tunisie n'a le choix que de participer à la marche du temps vers une intégration plus grande à son milieu méditerranéen. Elle doit oser y oeuvrer en réclamant de devenir membre de l'Union européenne dans le cadre d'un Espace méditerranéen de démocratie auquel elle appellera d'urgence. Car elle est déjà membre de l'Europe, mais informellement, sans droits, étant partie obligée, pour le moins, du système économique et financier de l'Europe et de l'Occident néolibéral. C'est en transformant l'officieux en réalité officielle qu'on anticipera au mieux le sort de demain d'imbrication totale du pays dans une réalité économico-financière qui le dépasse, à laquelle il ne saurait échapper. C'est ce qui pérennisera son ambition démocratique la faisant réussir. Sinon, le pays sera aspiré par le grand capital mondial, capitalisme dévergondé allié à la lecture intégriste de l'islam, un capitalislamisme sauvage transformant la Tunisie en souk où tout s'achète à vil prix et se vend au plus offrant.