Adresse au Président de la République :
Procédez sans tarder à la révolution juridique :
Libre circulation humaine
et abolition des lois de la dictature !
Monsieur le Président,
Au lendemain du jour solennel de votre investiture pour un nouveau mandat à la tête du pays, vous n'êtes pas sans savoir que le taux de voix porté sur vous lors de cette réélection, malgré son taux fort élevé, reste à relativiser par le taux encore plus fort d'abstention, notamment chez les jeunes qui, pourtant et massivement, étaient les premiers à porter sur vous leurs voix lors de votre précédente élection.
Pour cela, vous n'avez pas manqué, lors de l'allocution d'investiture, de parler de votre détermination à réaliser une révolution juridique dans le pays. Ce de quoi je n'arête de parler en cette République par vous voulue nouvelle, et ce ainsi que j'y avais appelé déjà au lendemain de la supposée révolution du jasmin que je qualifie de coup du peuple trahi par ses élites.
Une soif de droits et de libertés
Car ces jeunes et le peuple tout entier ont soif de droits et de libertés, ce que la législation actuelle ne leur permet pas d'avoir. Faut-il rappeler que l'on ne fait toujours qu'appliquer les textes des lois ayant permis à la dictature de sévir et de durer ? Et que la plupart de ces textes sont bel et bien un héritage du protectorat. C'est dire leur essence liberticide, notoirement contraire à la dignité des Tunisiennes et des Tunisiens.
Or, prétendre n'avoir à l'esprit que le règne de la loi égale pour tous, comme vous n'arrêtez de le faire — et c'est à votre honneur — n'a de sens que si la loi dont il s'agit est déjà juste ; ce qui est loin d'être le cas pour les lois en Tunisie, ne serait-ce que pour la raison évoquée.
C'est pour cela que, dès votre initiative salutaire du 25 juillet, je n'avais pas manqué de vous exhorter à abolir sans tarder la législation scélérate en vigueur. C'est avec un tel espoir que vous y alliez procéder incontinent que l'on a salué, partout dans le pays, ce que j'ai espéré être un contrecoup du peuple en une sorte de réhabilitation de son coup mis au rebut.
Car la supposée révolution de 2011 était venue camoufler un coup d'État en prétendant, bien en vain, satisfaire les revendications populaires ; d'où ma préférence, dès le début, pour coup du peuple — trahi donc — que d'illusoire révolution.
Nouvel ordre juridique
Certes, vous aviez pas mal de défis à relever et d'urgences auxquelles il fallait parer ; il n'empêche que l'abolition législative des lois de la dictature devait, à mon avis et en bonne logique, primer ; car tout l'édifice du pays reposait dessus. D'autant que vous avez parlé de Nouvelle République, ce à quoi j'appelle depuis 2011 ; or, il ne peut y avoir de République nouvelle sans un nouvel ordre juridique, plus juste et de libertés. Ce que demande le peuple ; ce fut bien votre slogan électoral lors de votre première élection, et ce que vous rappelez en impérative résolution lors de votre allocution.
Aujourd'hui, vous parlez ainsi de révolution juridique et elle s'impose à faire au plus vite en commençant par les lois les plus liberticides du Code pénal, cette oeuvre coloniale. Toutes ses lois attentatoires aux libertés individuelles devraient êtres gelées, sinon de suite abolies, et ce au nom même de la Constitution nouvelle et des valeurs religieuses auxquelles elle renvoie, puisque la foi d'islam est une foi de droits et de libertés, notamment en ce qui concerne la vie privative du fidèle.
Outre cette révolution juridique qui ne fera que venir s'harmoniser avec la révolution mentale effective au pays dont j’analyse en socialogue (mon néologisme pour observateur de la socialité) les aspects profonds de notre société composite. Le peuple tunisien, encore plus qu'avant, ne croit plus seulement à ses droits et libertés, mais les revendique de même, à juste titre, en légitimité absolue ; et il s'agit de tous ses droits, toutes ses libertés.
Aussi est-il une autre révolution à faire, également d'urgence, portant sur le droit intangible des ressortissants tunisiens à circuler en toute liberté, et ce tant chez eux qu'à l'étranger. Il nous faut donc arrêter impérativement ces scènes déplorables des jeunes refoulés par les agents de sécurité des zones où ils les soupçonnent de risquer l'émigration clandestine, comme à Sfax sur les navettes du ferry-boat de Kerkennah. Certes, c’est dans leur intérêt dira-t-on, mais cet intérêt s’évanouit du moment qu’il est une meilleure précaution qu'impose la dignité même de ces Tunisiens en tant que citoyens d’un pays souverain.
Comment y procéder ? Tout simplement en allant jusqu'au bout de votre raisonnement de changer les règles actuelles du jeu diplomatique désormais obsolètes et même criminogènes.
Poléthique, une politique éthique
Diplomate de carrière, je militais pour cette dignité à l'intérieur même de l'administration de la dictature, n'ayant en vue que servir au mieux, en tout légalisme, les intérêts de nos compatriotes ; ce qui ne plut pas, bien que se faisant avec le respect fatal du devoir de réserve qu’imposait mon statut, me valant d'être victime d'un détournement de procédure, comme c'était coutume bien rodée et fort connue de l'administration de ce que certains collègues nommèrent — avec raison — ministère des Affaires étranges. Bien évidemment, cela ne m'a point détourné du service de la patrie, m'adonnant alors, et avec plus de liberté, à une diplomatie informelle, toujours éthique, légaliste aussi et avec ses lettres de noblesse partout bafouées, et ce dans le cadre de ce que je nomme poléthique.
J'ai milité donc et milite pour que la circulation humaine soit libre de toutes entraves, appelant à en finir avec le visa actuel, cause et effet de la triste situation actuelle ; or elle est dramatique, nos compatriotes choisissant de mourir en mer ou sur les sentiers de l'aventure et des périls que de vivre dans leur patrie. D’autant qu’elle est réduite de plus en plus à une réserve indienne où même les lois scélérates de la dictature restent en vigueur à ce jour alors qu’elles devaient avoir été abolies au moins depuis juillet 2021.
Aussi, dans l'immédiat et au nom de l’éthique, Monsieur le Président, je vous exhorte à appeler l’Europe à la transformation, sans plus tarder, du visa actuel en visa biométrique de circulation. Ce qui a l'avantage de respecter les réquisits sécuritaires dont se prévaut l'Occident pour justifier sa politique migratoire et sa négation — avec le visa, source de drames et de crimes — du droit humain à la libre circulation, notamment en Méditerranée, cette mer commune supposée être de paix et de coopération.
Visa biométrique de circulation
Il s'agit d'un outil bien connu des chancelleries, mais très peu utilisé. Tout en maintenant le relevé des empreintes digitales — cette pratique heurtant tant le droit international que la souveraineté nationale —, il la compense par la délivrance gratuitement d'un visa valable un an, pour le moins et avec tacite reconduction, pour des entrées multiples donnant droit à un séjour ne dépassant pas trois mois continus. Voilà ce qui justifierait la poursuite de la coopération actuelle de nos autorités de sécurité avec celles de l'Europe et qui n'a guère de légitimité du moment qu'elle est l'oeuvre d'un gouvernement ayant argué de son respect du service des intérêts du peuple et de sa dignité. Or, circuler librement en est la manifestation avec cet outil en conformité avec les contraintes sécuritaires.
Car, aujourd'hui, la dignité du citoyen est bien dans son droit à circuler librement partout dans le monde conformément à la vocation ancestrale d'ouverture de son pays actuellement contrariée par l'acceptation du visa en vigueur. D’autant plus qu’il est non seulement obsolète, mais source de délits et de crimes, alors que rien ne justifie plus le maintien, même pas les supposées compensations financières octroyées pour l'aide sécuritaire obtenue et qui ne fait que brimer le citoyen tunisien sur sa terre même. Il suffit pour s'en rendre compte de rappeler les tristes scènes quotidiennes du côté de la gare maritime de Sfax - Kerkennah, comme dans toute zone frontalière ouverte sur ce qui est en train de devenir un sport populaire : une escapade vers les plus proches côtes européennes.
Voilà pour l'urgence absolue afin de mettre incontinent fin aux drames en augmentation exponentielle au large des côtes tunisiennes.
Code pénal du protectorat
Cela ne saurait toutefois faire oublier l'autre urgence, exclusivement nationale : l’absolue nécessité de parachever l'indépendance du pays encore colonisé par des textes juridiques datant du protectorat et maintenus à ce jour bien que niant aux citoyens leurs droits fondamentaux et leurs libertés individuelles. Même le fait qu'elles aient servi à consolider la main de fer de la dictature sur le peuple n'a pas encore suffi pour que nos autorités les abolissent tout en n’arrêtant pas de se réclamer, depuis 2011 et encore plus après juillet 2021, de la dignité et de la souveraineté du peuple.
Assurer vouloir faire entendre sa voix et répondre à ses attentes, comme vous ne manquez pas de l’affirmer et le répéter, nécessite des actes concrets mis en oeuvre sans plus tarder. En l'occurrence, il s'agit d'abolir les lois de la honte attentant à la dignité des Tunisiennes et des Tunisiens, qui sont la trame du Code pénal en vigueur, un ensemble de lois scélérates, pour l'essentiel, établies sous le protectorat. Or, nombre de ses dispositions se prévalent à tort de l'islam, qu’elles caricaturent, en matière de droits et de libertés particulièrement, alors qu’elles prétendent le protéger mais le violent en attentant à la sacralité de sa protection absolue de la vie privée de ses fidèles.
Volonté et volupté d’une libre pensée en actes
Monsieur le Président,
C’est, en toute sincérité, un pan de ma militance pour la Tunisie que je me permets de porter à votre connaissance, en saisissant votre credo — réaffirmé lors de votre seconde investiture à la tête du pays — d’être à l'écoute de toutes les voix libres n'ayant pour vocation que le service de l'intérêt de notre patrie.
Ce qui est bien une vocation avérée pour moi, mes écrits et publications en témoignant ; en ayant même payé le prix fort d'une carrière diplomatique saccagée par les injsutes après avoir échoués à faire taire une voix incarnant la tunisianité, cette dignité jubilatoire d’une volonté et volupté de libre pensée en actes.
Ce que je reste malgré les avanies d'un temps fort en turpitudes dans un monde à la dérive. N'est-ce pas le devoir de tout esprit libre et éthique ? Particulièrement en cette Exception en puissance qu’est notre Tunisie ?
Vivement donc la poléthique en une société réconciliée avec elle-même, réveillée à sa nature profonde et à sa foi des Lumières, populairement incarnée toujours en fair-pray, une foi de droits et de libertés pleine de tact, émancipée des vicissitudes d'un legs jurisprudentiel ayant fait son temps grâce à ce que je nomme Noes-is : Nouvel Esprit I-slamique.
Dont acte.
Avec mes voeux de pleine réussite au service des intérêts bien compris du peuple tunisien dans cette phase décisive de votre action à la tête de son État que nous souhaitons tous souverain, prospère et surtout digne parmi les États d’un monde en crise. Que la Tunisie en montre une issue de sortie parfaitement en harmonie avec ses fondamentaux !