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I-SLAM : ISLAM POSTMODERNE








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dimanche 5 décembre 2021

Une exception Tunisie en puissance 2

Révolution an 0

Pour des retrouvailles 

avec Farhat Hached

 

On dit le président de la République, qui vient de débaptiser la date de la supposée révolution tunisienne pour le 17 décembre, prépare sa version de ce que serait une vraie révolution avec souveraineté populaire. Ayant entrepris par son contrecoup du peuple du 25 juillet à sauver l'esprit du coup du peuple réduit à un simple coup d'État, il se doit donc d'abolir les lois de la dictature encore en vigueur alors qu'elles contraires aux lois et libertés constitutionnels. Ainsi et ainsi seulement son contrecoup du peuple du 25 juillet sera une réussité; sinon il ne sera que le coup de force dont d'aucuns parlent.

Dans l'attente de ce possible nouveau départ d'un révolution en son an 0, il est impératif de rappeler, outre la nécessité de la totale rupture avec le passé - que doit symboliser, rappelons-le ! l'abolition des lois de la dictature et du protectorat -, l'impératif de retrouvailles avec celui qui fut le meilleur des patriotes de Tunisie, Farhat Hached en ce jour anniversaire de son assassinat. C'est ce qui ferait renaître l'espoir en un modèle tunisien sui generis au sein de cette Exception Tunisie qui aurait pu réussir sa révolution 2.0, un modèle de genre politique nouveau de la transformation du virtuel en réel par la seule volonté du peuple si seulement ses dirigeants s'étaient inspiré de l'exemple de Hached.

Voici donc ce en quoi se résume le patriotisme tel qu'incarné par celui qui a osé déclarer sa flamme au peuple. Et ce n'est rien d'autre  que ce que je lis sur les lèvres de tout Tunisien que je rencontre dans la rue. Il s'agit, bien évidemment, de ces humbles mais dignes personnes, jeunes et vieilles, qui forment l'âme vive de ce pays et dont on fuit habituellement la compagnie et la misère, qu'on n'écoute ni n'entend, malgré la sagesse de leur propos bien visionnaire, qui ne dédaigne pas le réel pour un principe réducteur de la réalité, ne connaissant que ce réel, leur actuel et leur quotidien, si dur à supporter sous les lois actuelles. 

Être l'amant du peuple : Pour réussir à les servir, il faut avoir le panache de proclamer haut et fort son amour pour le peuple ainsi que l'a fait cet amant du peuple emporté en pleine passion avant même d'avoir quarante ans. Or, nos politiques, trop englués dans leur ego, aveuglés par un nombrilisme les empêchant d'être en empathie avec la populace, se soucient comme d'une guigne de ce qu'ils perçoivent être une mièvrerie. Pourtant, c'est ce qu'attend impatiemment le Tunisien, un nouveau Farhat lui déclarant sa flamme, lui disant, car le croyant et le vivant dans tous les actes de sa vie quotidienne, jusqu'à y offrir sa vie : Peuple, je t'aime !

Oui, osons le dire haut et fort : Peuple, je t'aime ! Mais manifestons-le par l'acte d'amour précité qu'est l'abolition de la législation de la dictature. Car plus que jamais, aujourd'hui, faire la politique c'est être capable d'aimer concrètement, aimer ce peuple humble, avec ses petitesses et ses grandeurs, ses seigneurs et ses petites frappes, et surtout tous ses pauvres hères en garantissant leurs droits et libertés. C'est d'autant plus nécessaire que personne n'est préservé des turpitudes de la nature humaine, les aléas de la vie, sauf les êtres libres de leur destnée, ayant des droits et des libertés pour être dignes, mériter la dignité ! C'est qu'il est une force prodigieuse dans l'amour dont seul un politique véritable, comme le fut Farhat, sait user à bon escient sans afféterie et sans mensonges avec un peuple qui doit être aujourd'hui roi qui s'affiche après avoir été longtemps simple roi clandestin.


Le politique doit résumer dans son action et concrétiser de la façon la plus éloquente la force des idées ; car se croire libre, c'est mobiliser la capacité mentale pour le devenir. C'est que la liberté n'est pas une représentation, un concept ; elle est bien une force. Et quel slogan plus mobilisateur, plus fort que cet hymne d'amour de toute éternité de l'enfant de Kerkennah aujourd'hui en colère : Peuple, je t'aime ?

Aimer un peuple libre et digne : Le nouveau moment historique que nous vivons n'est plus à singer une pratique politicarde venant d'outre-Tunisie et qui a fait banqueroute ni une idéologie étrangère à cette terre prétendant prendre source au ciel et qui ne fait que ternir la splendeur céleste ! Le temps est venu de s'ouvrir aux réalités de ce peuple dont l'âme est riche de merveilles attestées, faites de talent, d'ingéniosité et d'originalité. Il est temps de déclarer la Tunisie terre d'amour, de fraternité et de faire la politique comme on fait l'amour, non de décrier ce sentiment essentiel, à l'origine de l'humanité. Pourtant, son peuple est encore prisonnier soit des chaînes des idéologies soit des boulets des lois scélértaes ayant permis à la dictature et au colonisateur avant elle de le brimer. Il est temps de les abolir ! Comme le président de la République annonce célébrer la souveraineté populaire le 17 décembre, qu'il en fasse aussi la journée de l'émancipation véritable du peuple de la législation illégale de la dictature, notamment ses lois pénales ! Et qu'il n'hésite surtout pas à pareil acte ô combien symbolique dans le sens de ses convictions en n'écoutant pas les voix qui lui font craindre l'effet négatif de l'abolition des lois supposées morales du Code pénal alors qu'elles fondent et cultivent l'immoralité ! Ce sont elles qui empêchent le peuple d'être libre et digne, et donc d'être lui-même : génial, faisant bel et bien ce que je confirme être une Exception Tunisie. Que les plus pudibonds de notre élite politique sachent donc que dans l'homme, il y a d'abord de l'humus, et que le spirituel ne s'incarne véritablement que dans le matériel ! Qu'ils sachent que toute sublimation des valeurs, si elle n'est pas libre, venant d'une assomption de ce qui est de plus trivial en l'homme, est une porte ouverte au retour du refoulé, au dramatique passage de l'animalité à la bestialité.


L'heure de vérité pour Kaïs saïed : L'honneur du politique tunisien aujourd'hui est d'aider à ce que, sur cette terre de tolérance et d'ouverture, un esprit politique nouveau souffle enfin, esprit paraclétique, humainement universel et spirituellement œcuménique pour l'épiphanie chez ce peuple paisible d'une façon postmoderne de faire la politique et de vivre la religion. Il est temps de passer en Tunisie d'une croyance dogmatique à une foi rationaliste, véritablement islamiste, conforme à l'esprit d'une religion révolutionnaire, qui a été moderne à son avènement et qui ne peut qu'être postmoderne aujourd'hui, toujours en avance sur son temps. Le politique de ce qui serait l'an 0 du coup du peuple, cette révolution tunisienne introuvable, doit donc être doté d'une vue qui n'en est pas une, étant plutôt une perception éthique, un sens infaillible de la vérité, une vision somnambulique ou magnétique de la réalité échappant à nos sens communs.

Aujourd'hui, en ce jour du 69e anniversaire de l'assassinat de Farhat Hached et à l'orée du 17 décembre qui pourrait être la confirmation de l'aboutissement enfin du coup du peuple de 2010-2011 par son contrecoup de 2020, il est encore temps pour notre élite, et à sa tête le président kaïs Saïed, détenteur de tous les pouvoirs actuellement, d'avoir la conscience théorique de la fatalité de ce que j'avance sur la transfiguration nécessaire de la pratique politique. Il est parfaitement possible pour que l'on passe enfin du chantier actuel, cet espace de tâtonnement et de découverte, à l'étape décisive de la théorisation de l'expérience tunisienne avec la clarté nécessaire afin d'en faire le modèle politique incontournable offert aux générations futures. Or, cela commence par une réelle copure enfin avec le passé, aussi bien immédiat que lointain, et que ne saurait incarner que la mise à bas de ce qui le fait durer : non pas seulement le système politique, mais d'abord la législation gouvernant le quotidien populaire. Ce sera à la fois une somme philosophique, psychologique et pratique dont la Tunisie fera présent au monde entier comme la conception nouvelle de l'humain postmoderne, un posthumain moins matériel et plus spirituel.

C'est à quoi l'expérience politique en cours actuellement en Tunisie est idéalement appropriée. C'est le second souffle à lui donner, ne reniant rien de ses principes originaires, mais n'insultant point un avenir qu'il appartient au peuple de Farhat, retrouvant ses droits, tous ses droits, et ses libertés, toutes ses libertés, de tracer sur la conscience du monde, reprenant son cri du cœur à l'intention du monde entier appelé à la solidarité véritable et à l'œcuménisme sans arrière-pensées : Je t'aime, ô humanité

Ce serait le message révolutionnaire au monde de notre Tunisie du Coup du peuple s'il vient à réussir à s'incarner le 17 décembre, cette veille de sa seconde occurrence, année 0 d'une Révolution ne faisant que commencer son épopée postmoderne. Pourvu que M Kaïs Saïed sache enfin troquer la haine pour l'amour en rendant enfin ses droits et libertés au peuple pour  suivre l'exemple de l'amant du peuple, le grand Farhat, criant alors au peuple, preuve juridique à l'appui : Je t'aime !

Que je t'aime, ô peuple !*

       Farhat :

Que je t'aime, ô peuple ! [1]

 

            Que je t'aime, ô peuple de Tunisie qui a été éprouvé par le destin et l'a éprouvé, sachant de toi la bravoure avec le dévouement et connaissant en toi la patience avec la persévérance.

            Que je t'aime pour ce que tu as en toi de sentiment expansif et de noble affectivité, et pour ce dont tu ressens d'attendrissement aux calamités et de fraternisation aux catastrophes ; j'aime en toi l'intrépidité à l'assaut des obstacles et la générosité dans l'effort à la sauvegarde de l'affaibli au besoin.

            Que je t'aime dans ta solitude aux malheurs et ta solidarité face à l'adversaire et ta résistance face à l'agression.

            Que je t'aime pour ce dont tu débordes, de qualités autant de fierté pour toi et le noble caractère qui te tient la tête haute ; que je t'aime pour ton amour du travail et ton attachement à tes valeurs sacrées. Que je t'aime pour ton sens du partage des joies de l'opprimé lors de sa victoire sur l'injustice et pour la part prise à atténuer la tragédie du lésé, à l’aider ; ainsi, dès que tu ressens le danger menacer un membre ou une part de l'ensemble humain dont tu es une partie, ton cœur bat à l'unisson et ton âme toute vibre à repousser le moindre préjudice. 

            Tu es devenu, ô noble peuple tunisien, modèle de la franche unité difficile à ton adversaire de la défaire quoi qu'il fasse et quoi qu'il entreprenne, s'ingéniant à répandre malice et intrigues ; une telle unité est loin d'être artificielle ou truquée, car elle est une solide unité réelle, concrète et palpable, se déclinant dans sa plus belle expression.

            Et que je t'aime lorsque tu cherches et persévère à trouver et comprendre cours et causes du déclin de ton pays et l'avancement de sa cause ; lorsque tu critiques et lorsque tu vitupères, lorsque tu es en colère et lorsque tu boudes. Que je t'aime aussi lorsque tu défends les différentes théories qui te passent par l'esprit en matière de pratique de politique générale et lorsque tu interroges, interpelles, discutes et juges. Mais, au moment des difficultés, tu délaisses les contentieux, oubliant tout conflit le temps des sentiments, rappliquant de tout endroit, abandonnant tes occupations, te livrant tout entier là où se rencontre, se renforce et se réalise ta force diffractée en une ligne seule, ligne du peuple uni dans son objectif et parole, ligne de la nation combattante et ligne de la vérité défendant son  droit à l'existence, militant pour sa libération.       

            Alors, tous sont là : maître, dirigeant, patron, paysan, commerçant, employé, fonctionnaire, industriel ou étudiant ; grand et petit, hommes et femmes, médecin et professeur, ignorant et savant, vieux et jeune, riche et pauvre.

            De toutes tes composantes, particuliers et classes, tu te tiens côte à côte, prêt aux urgences, criant calmement à la face de l'ennemi avec ce que tu as de foi et de confiance en toi, un cri qui abasourdit les agresseurs et bouleverse les assises de l'injustice, de la tyrannie ; ce qui fait reculer l'adversaire, interdit, ne distinguant plus entre voie du salut et voie de sa perte.

            Grâce à ta solidarité, tu as imposé le respect ; par ton unité, tu as triomphé des difficultés, par ton sacrifice, tu as balisé la voix de la victoire, et par ta persévérance tu as défait l'ennemi, lui faisant perdre raison et lucidité, ne sachant plus ce que serait le devenir. Car est révolu ce temps de division de la nation à l'advenue des catastrophes, dissuadant l’adversaire ; alors, serein, il se répand en promesses pour qui cherche à s'en rapprocher, foulant au pied ses frères dans leur malheur afin d'obtenir le contentement du tyran oppresseur.

            Est révolu ce temps du Tunisien ne ressentant pas les peines de son prochain ni ne se souciant des choses de la vie que de ce qui est gros de butin pour sa personne, et ce quelle qu'en soit l'origine.

            En effet, notre peuple a échangé un tel temps par une communion dans le bonheur et le malheur ; il est devenu conscient que le succès de l'un et la félicité de l’autre sont dans ceux de tous et la fierté personnelle dans celle du pays, sa patrie, et sa dignité humaine est dans la dignité de sa patrie, le respect dû à son intégrité, sa souveraineté. Ainsi, le maître rencontre le plus humble des employés lors du malheur, car sa flèche est, au vrai, dirigée vers nous tous ; aussi faisons-nous face ensemble, en parfaite unité ; celui qui a été touché n'étant que l'un de nous.

            Telles sont les leçons que nous dictent l'épiphanie de l'unité nationale bien manifeste à l'occasion de la tragédie d'Ennfidha[2] qui a été un exemple de solidarité effective et bien le gage d'un succès imminent.

            Les grévistes d'Ennfidha sont tombés et alors s'est levée la nation tout entière réclamant justice, rencontrant un écho favorable de tous les côtés. Les grévistes de Zaghouan et d’Ennfidha furent aussi arrêtés, et alors la classe travailleuse a crié d'une seule voix, et le peuple tunisien avec elle, en un jour dont l'histoire témoignera comme étant un jour de gloire et de souvenirs impérissables.

            Aussi je t'aime et suis-je fidèle à te servir !

            Si tu persévères ainsi uni, par Dieu, jamais tu ne seras vaincu

 

Rideau



[1] Article publié au journal La Liberté en date du 21 décembre 1951 et ce près d'un an avant l'assassinat perpétré le 5 décembre 1952. L'article a été écrit un mois après l'incident d'Ennfidha auquel il y est fait référence, et qui a été jugé par Hached comme une terrible boucherie dans un discours prononcé au moment de l'incident. Ce jour, il le considéra de deuil et de tristesse ainsi que, dans le même temps, jour d'union et de joie, ayant administré la preuve à tous les Tunisiens que la force appelle la force et que le salut de la Tunisie et de son peuple est dans la lutte continue pour la liberté. 

[2] Il s’agit de l’incident d’Ennfidha qui date du 21 novembre 1951 survenu à l’occasion de la grève des employés de la propriété d’Enfidha, jugée illégale par les autorités coloniales qui la réprimèrent sauvagement. On déplora alors la mort de cinq grévistes parmi les travailleurs dont une femme enceinte de jumeaux. Ce drame fut un choc pour tous les Tunisiens. Le jour même, soit le 21 novembre, Farhat Hached fit un discours par lequel il fustigea ce qu’il qualifia de boucherie, déclarant ce jour « de chagrin et de deuil », tout autant, dans le même temps, que « jour d’unité et de joie ».


* Extrait de mon opéra bilingue en 17 scènes du meilleur de la poésie de Chebbi et des paroles de Hached.