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I-SLAM : ISLAM POSTMODERNE








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mardi 18 août 2020

L’exception i-slamique 9

Le concept obsolète de l’inégalité successorale en islam




  
Lors de la fête de la femme, le président de la République a affiché son attachement au concept de l'inégalité successorale au nom du respect de l'islam, ne décevant pas que les femmes et les militants des droits humains. Il a désappointé aussi ceux qui militent pour sortir l'islam de son actuelle maladie ayant fait une croyance obscurantiste d'une foi des Lumières, une modernité avant la modernité occidentale que je nomme rétromodernité.

Ce faisant, Monsieur Saïed obère sa propre militance pour une Tunisie progressiste, l'État de droit auquel il appelle devant s'épanouir au préalable dans une société de droits et de libertés où le citoyen est en pleine possession de ces manifestations basiques de la dignité, en étant titulaire tant dans sa vie publique que privée. La vision présidentielle étriquée en cette matière ô combien sensible est grosse de retombées néfastes, car elle fige les mentalités sur leurs blocages antiques, ceux-là mêmes qui empêchent la moindre avancée en tout autre domaine au nom d'une sacralité bafouée.  



Rénover nos concepts

La sacralité en islam est d'abord morale et ne s'applique pas aux choses de la vie humaine, appelées à évoluer pour se parfaire. Il est temps de réaliser l'obsolescence de notre conception du sacré islamique appliqué au concept de l'inégalité successorale ! Il nous faut oser enfin interpréter cette question hors de l'exégèse classique qui a prévalu au détriment d'opinions honorables contraires. Il doit être enfin légitime d'affirmer que c'est l'islam lui-même qui commande l'égalité parfaite en tout, y compris en successions. Ses visées l'imposent et elles sont les seules d'interprétation absolue, prévalant à la lettre des textes contraires dont le sens supposé absolu et définitif n'est que le fait d'une cogitation humaine forcément imparfaite, et donc à parfaire.

En consacrant la finalité de l'égalité parfaite en toute chose humaine, l'islam n'a été que rationaliste tout à fait logiquement puisqu'il se veut une religion scientifique, adaptée à son temps, en constante évolution. C'est le sens même de la science qui évolue selon l'advenue du fait polémique. D'où, au reste, la technique de l'ijtihad, effort constant et continuel, ne devant obéir qu'aux visées de la loi religieuse, règle nullement discutable depuis le 8e siècle et les travaux de l'imam andalou Chatibi. 

N'en déplaise aux tenant de l'inégalité successorale, nombre de concepts éculés en islam doivent laisser place à ceux devant s'imposer à tout musulman attaché au génie de sa religion, sceau des Écritures, foi révolutionnaire pour tout temps et tout lieu. Parmi eux figure, en premier, le concept de l'égalité, en général comme en matière successorale, eu égard à la charge symbolique de celle-ci. Il n'y a pour le contester que des machistes ou ces imams soucieux de sauvegarder un faux magistère qu'ils ne tirent que de l'effort de leurs prédécesseurs qu'ils ne font que ruminer. Ce qui viole l'islam en son essence égalitaire, justifiant toutes les dérives qu'on lui voit, l'ayant transformé en une foi de haine et de crimes avec ce Daech qui se targue d'être le pur produit d'un fiqh qu'il nous faut impérativement rénover.



Du concept en général

Le concept est cette idée générale qui n'est qu'une représentation mentale et abstraite que l’on se fait d’un objet, vivant ou non : concept d’arbre, de vérité. Par extension, c'est la définition des caractères d’un produit par rapport à la cible. Ainsi parle-t-on des concepts publicitaires, de nouveaux concepts de marketing. Dans le commerce, nous avons aussi l'expression "magasin concept" désignant un magasin conçu et présenté en fonction d’une thématique.

De nos jours, la tendance générale est de tout organiser selon des thèmes au nom d'une bonne gestion dans le cadre de cette mode de gouvernance appelée GPO (gestion par objectifs). Or, ce n'est pas inconnu de l'islam, cette modernité par anticipation ayant précédé la modernité occidentale.

Rappelons l'étymologie du terme concept qui est un emprunt au latin "conceptus" signifiant "contenu entièrement". Elle est la même origine que l'autre mot proche de concept qu'est la conception qui y ajoute juste l'action, la conception étant aussi du latin (conceptio) qui est "l'action de contenir entièrement", et du terme "conceptus" précédemment indiqué. Cela nous amène à dire que la conception, qui est la manière d'envisager et de juger une chose (conception de la démocratie, par exemple) est également cette action de concevoir une idée, de former un concept dans son esprit ou l'action de créer après réflexion (conception d’un nouvel appareil).

La conception est également la formation d’un nouvel être vivant par la fusion d’un spermatozoïde et d’un ovule ; c'est aussi moment de cette formation. On dit de la sorte que la naissance de l’être humain a lieu normalement neuf mois après sa conception, ce qui désigne la formation de l'être vivant, que cela soit de la manière susindiquée ou selon le dogme catholique de l'Immaculée Conception de la Vierge Marie née exempte du péché originel. On parle aussi, en informatique, de conception assistée par ordinateur pour désigner l'ensemble des techniques informatiques utilisées pour assister un processus humain de création, pour concevoir un produit nouveau.



Concept d'inégalité successorale

Le concept est donc une conception qui nécessite une certaine durée (neuf mois généralement pour l'être humain) ; ce qui doit amener à dire qu'il n'est pas de concept sans durée qui s'y attache. C'est un peu sa date de validité. Au-delà de cette durée, il y a péril. Comme tout produit issu de la créativité humaine, le concept a sa date de péremption, au-delà de laquelle il est à rejeter, sinon il tombe en obsolescence, devenant même néfaste pour la santé au-delà de sa durée de conception.

C'est le cas du concept de l'inégalité successorale en islam qui a été utile un temps, ayant représenté une avancée en matière des droits humains du temps où la femme n'avait aucun droit. Or, il ne s'agissait que d'un concept à durée déterminée, évolutif par principe, devant céder la place à l'égalité parfaite avec l'évolution des moeurs et des situations.

Par conséquent, c'est bien la loi de la nature et les visées de la Loi religieuse qui commandent de ne plus faire usage de ce concept de l'inégalité successorale devenu obsolète. On ne peut s'y soustraire au prétexte qu'il a été prévu par un verset, car alors on défigurera l'islam en s'en tenant à sa lettre, comme quand il a prévu de manière aussi catégorique de couper la main au voleur. Il importe d'être logique et de respecter l'esprit de notre religion et sa philosophie même de foi humaniste et égalitaire. Il faut toujours revenir aux principes qui sont dans les visées de la Loi religieuse.

Logiquement, l'ensemble du fiqh qui n'a été qu'un effort humain doit être revu, y compris ce qu'on prétend être non modifiable, car qui l'a décidé ainsi ? N'est-ce pas un diktat humain qu'on prétend substituer à la volonté de Dieu ? Prétendre qu'un verset évolutif est à figer, c'est se prendre pour Dieu qui impose d'user de sa raison dans le cadre des visées de son message. C'est même une obligation de par la religion qu'on néglige : l'ijtihad qui est aujourd'hui le véritable jihad, le seul d'ailleurs désormais en islam : jihad akbar ! C'est l'oubli de l'ijtihad qui a permis la création de Daceh ; aussi, c'est lutter contre Daech que  réaliser l'égalité successorale !

Ceux qui s'insurgent contre cette fatalité commandée par l'islam lui-même devraient plutôt cogiter sur la meilleure façon de la réaliser sans trop heurter les mauvaises habitudes qui se sont incrustées chez les croyants qui dénoncent l'atteinte à leur foi quand on ne fait que la toiletter des impuretés que la raison humaine imparfaite y a accumulée. La question ne doit plus être s'il faut réaliser l'égalité successorale en islam, mais comment y parvenir en souplesse.

À ce propos, je rappelle mon projet avancé il y a un temps qui permet une réalisation immédiate tout en souplesse de l'égalité successorale avec un simple texte législatif à insérer dans le livre neuf du Code du Statut personnel. Il suspend pour une durée de dix ans la règle de l'attribution à l'héritier masculin d'une part double de celle revenant aux femmes.  Durant cette période, sauf refus avéré de la femme concernée, il lui sera attribué une part égale à celle revenant à l'héritier de sexe masculin, ce dispositif devant être évalué en fin de période pour être confirmé et rendu définitif ou abrogé.



 Tribune publiée sur Réalités Magazine 
n° 1807 du 20 au 26 août 2020 (pp. 20-21)