L’exemple français à ne pas
suivre
La défaite socialiste aux
municipales est arrivée comme annoncée. Et ainsi que prévu, elle a vu la
présidence française suivre les yeux fermés le rituel quasi sacré voulant que
l’on sacrifie le premier ministre à la vindicte populaire. C’est ce qu’on
appelle privilégier une soi-disant démocratie d’opinion à la responsabilité
politique. La première suppose, comme on l'a fait, de coller à ce qui semble
être l’opinion publique, même dans ses manifestations apparentes et trompeuses.
La seconde privilégie une ligne directrice fondée sur un choix et une éthique
politiques; ce qu'on n'a pas fait.
Voilà donc le socialiste le
plus à droite à Matignon dans un gouvernement élu sur des convictions et des
engagements de gauche. Drôle de leçon que M. Hollande tire comme enseignement
du vote de défiance de ses concitoyens, qui est surtout une manifestation de
déception pour des engagements qu’il a omis de tenir.
Cautère sur jambe de bois
Certes, la défaite a amené à
la tête de plus d’une centaine de villes des représentants de l’extrême droite
xénophobe, mais cela ne voulait pas nécessairement dire une exigence de
politique de droite. C’est pourtant ce que croit à tort le président français
rejetant, par exemple, la carte Fabius qui aurait pu apporter à Matignon une expérience certaine et un
savoir-faire diplomatique fort utile en ces jours troubles.
C’est de plus de justice et
de considération que voulaient les Français, moins d’arrogance et
d’irresponsabilité de la part de leurs dirigeants, notamment les plus en vue.
Ce n’est pas un discours xénophobe qu’ils ont tenu, mais un ras-le-bol de
l’incapacité de leurs dirigeants à apporter les solutions adéquates pour mettre
fin justement au discours haineux de certains, surtout de l’étranger.
Or, comme la meilleure façon
de le montrer était de voter extrême, le peuple français l’a fait, non pas
parce qu’il serait devenu tout d’un coup extrémiste, mais juste pour que cela
fasse l’effet d’un électrochoc sur ses dirigeants. Il aurait fallu plus de
lucidité et de clairvoyance à ceux-ci pour saisir le message des électeurs. Au
lieu de cela, ils n’ont vu que l’écume, celle d’un désir d’ordre, d’autorité et
de sécurité. Cela s'appelle un cautère sur jambe de bois.
C’est un tel exemple qu’il
ne faut pas à nos politiciens suivre aveuglément. Je veux dire par là qu’ils ne
doivent pas tomber dans le piège de la soif du peuple pour la démocratie pour
se presser de lui servir une démocratie juste formelle, réduite à des élections
nationales, même pas régionales et locales. Pareillement, l’envie de couper
avec le passé ne suppose pas d’en exclure les hommes, mais d’abord d’en
éliminer le système juridique qui a fait ces hommes et que reprennent d’autres
hommes, guère différents des premiers, ne faisant qu’exclure leurs adversaires
pour abuser du pouvoir à leur avantage, aux dépens du peuple.
Pour une po(l)éthique
Une démocratie qui se
respecte étant la souveraineté du peuple et celle-ci devant s’exprimer au
travers de droits et de libertés reconnus, il est important donc que la
priorité dans ce pays pour ses dirigeants sincères soit la mise en œuvre les
acquis de la constitution au plus vite, et même avant l’organisation
d’élections.
C’est en réformant le
système juridique de la dictature, en rompant avec ses pratiques et en
remettant le peuple au cœur du système politique avec des élections locales et
régionales, impliquant le choix de ses gouverneurs, qu’on coupera véritablement
avec l’ancien système et qu’on immunisera véritablement la révolution.
Sur le plan international, la
Tunisie doit innover en diplomatie, et ce en appelant à plus de solidarité en
Méditerranée. Recevant bientôt M. Jomaa, le nouveau premier ministre français
ne manquera certainement pas de conditionner l'aide de la France à un
renforcement des mesures sécuritaires de la gestion inepte de la politique
migratoire. On se doit d'y opposer un refus net au nom de l'intérêt commun
commandant l'instauration d'un espace de démocratie dans notre mer commune. Il
est temps de réapprendre à y circuler librement selon des mécanismes sûrs
éprouvés, de nature à mettre fin à la dérive terroriste que la fermeture
actuelle des frontières encourage.
Ne nous laissons donc pas
aller au jeu politicien tel qu’on le voit sous nos yeux à l’étranger et chez
notre plus proche voisin au sens de la politique en son sens premier, celui qui
compte ! En effet, nous avons assez de valeurs dans nos traditions pour nous permettre
de rendre à la pratique politique ses lettres noblesses, en faisant une
po(l)éthique !
Publié sur Leaders