Une leçon du drame : l'élu d'une Assemblée révolutionnaire rend
des comptes au peuple, seul souverain en permanence !
Avec le crime odieux qui a
ravi la vie à Chokri Belaïd, c'est à la démocratie qu'on a attenté et à la souveraineté
populaire que l'on s'est pris, cherchant à museler le peuple, spolier sa
liberté acquise de haute lutte.
Aussi est-il indispensable
de rappeler haut et fort en Tunisie, et surtout au niveau de la légitimité
électorale qu'est l'Assemblée Nationale Constituante, que la souveraineté en
premier et en dernier lieu n'appartient qu'au peuple et qu'elle ne doit jamais
lui être confisquée, même pour un temps.
La situation actuelle en
Tunisie, plus que jamais, appelle à la démocratie directe en notre pays et tout
patriote véritable ne peut qu'agir en ce sens, car le seul barrage à toutes les
dérives de toutes sortes. Et nous situerons notre propos exclusivement au
niveau du fonctionnement actuel de l'Assemblée des élus du peuple.
Or, avec le tourisme
parlementaire, on semble avoir opté en notre pays pour le système de la liberté
du député par rapport au parti grâce à l'investiture duquel il a été élu. Ce
n'est pas le meilleur des systèmes pour une démocratie naissante, mais il n'est
pas illégitime. Toutefois, le député qui s'est ainsi libéré de la tutelle
partisane ne l'est pas pour autant de celle qui le soumet au peuple. Surtout
qu'il est censé représenter tout le peuple dans son ensemble.
En représentant de tout le
peuple, l'élu de l'Assemblée nationale constituante, ayant la prétention d'être
une assemblée représentative de la Révolution, doit rendre des comptes au
peuple. Or, une fâcheuse habitude s'est répandue dans les travées de l'ANC
répétant à l'envi que l'Assemblée est sa propre maîtresse. Et il n'y a pas
affirmation plus fausse, car l'ANC n'est maîtresse de rien, si elle ne se
soumet pas régulièrement au peuple de qui elle son pouvoir par délégation, le
peuple demeurant le vrai et seul maître en permanence.
Aussi doit-elle constamment
lui rendre des comptes et requérir son assentiment. Et cela ne doit cependant
pas être limité aux échéances électorales qui restent le moment privilégié pour
ce faire, mais elles ne doivent pas être les seules dans une démocratie directe
comme celle que nous souhaitons pour la Tunisie.
En effet, dans une
démocratie véritable, le député doit être conscient qu'il est d'abord et avant
tout le serviteur du peuple, étant à son service à tout instant et surtout ne
devant pas chercher nullement à profiter de son mandat pour se servir.
Ce n'est pas le cas
aujourd'hui, en Tunisie. Passe encore que l'on se serve des traitements et des
indemnités que l'état de pauvreté de l'écrasante majorité du peuple ne doit pas
permettre! Mais sans compensation, on ajoute à l'indélicatesse du mépris. Il faut donc absolument une
contrepartie à pareils privilèges et elle doit prendre la forme d'un contrôle
régulier sur l'activité de l'élu du peuple, son rendement, et l'accomplissement
au jour le jour de sa mission selon ses engagements.
Cette évidence ne semble
toutefois pas convenir à nos élus qui rechignent à se plier aux exigences de
l'OpenGov ou de la démocratie directe. On l'a vu avec les caprices de la
vice-présidente de l'ANC limitant la liberté des journalistes et on le vérifie
avec les difficultés rencontrées par l'association La Boussole pour rendre
compte du travail à l'Assemblée.
Aussi est-il désormais
urgent que nos élus, s'ils sont vraiment épris de l'esprit de la Révolution,
comme ils l'assurent unanimement haut et fort, mettent à l'avant de leurs
priorités un texte à voter toutes affaires cessantes soumettant l'élu du peuple
au contrôle continu et de tout instant d'instances représentatives de la
société civile comme l'association précitée Al Bawsala dont l'action doit être
déclarée d'intérêt public.
L'histoire politique a déjà
eu l'occasion de mettre les Arabes en tête d'un chapitre essentiel de la pensée
et de l'aventure humaine; il est temps qu'avec le Coup du peuple tunisien
s'écrive un nouveau chapitre de cette histoire et cette pensée. Cela passe par
la prise en compte des progrès humains et non leur rejet. Or l'OpenGov, la démocratie
directe est aujourd'hui un aspect essentiel du progrès de la pensée politique
dans les démocraties du monde. Soyons parmi elles, adoptons au plus vite le
texte ci-après ou un texte allant dans le même sens, faisant de notre pays une
véritable démocratie directe.
Voici donc un texte que je
propose à la perspicacité de nos élus et à leur sens de l'intérêt public à
adopter en extrême urgence et qui s'ajoute aux dispositions de démocratie
directe que j'ai déjà proposé de rajouter aux articles du projet de la
Constitution dans le cadre des amendements nécessaires à apporter. (cf. mon
article en arabe ici). Et qu'ils décident de reprendre au plus
l'activité pour laquelle ils ont été élus, chaque jour qui passe ajoutant à la
confusion, aggravant la preuve de l'irresponsabilité désormais avérée de la
plupart parmi eux !
Ces textes dans la
formulation proposée, ou toute autre formulation de même inspiration quelle que
soit la forme finale à lui donner, doivent faire l'objet d'insertion dans la
Constitution. Il reste que le sens révolutionnaire commande d'adopter le texte
relatif au député au plus vite, eu égard aux dérives actuelles :
Projet d'article sur le contrôle de l'activité de l'élu/député :
L'élu est le représentant de
tout le peuple tunisien et a pour mission de le servir exclusivement.
Il lui rend compte
régulièrement de la mission a lui confiée au vu de ses engagements électoraux.
Ce contrôle est exercé par
des institutions indépendantes représentatives du peuple et de la société
civile selon les modalités déterminées selon les conventions d'une démocratie
directe.
Aucune restriction ne doit
être apportée à l'activité de ces institutions dans l'exercice de leur activité
d'intérêt général dans lequel elles doivent prévoir, au moins, un compte rendu
mensuel public de l'activité factuelle de tout élu du peuple, notamment quant à
son assiduité et à son rendement effectif à l'Assemblée eu égard à ses
engagements devant le peuple.
La liste de ces institutions
est dressée au débit de chaque année de la législature.
Les journalistes participent
aussi à ce contrôle exercé sur la mission des élus du peuple dans l'intérêt
général à la seule condition d'une information objective, basée sur les faits
avérés.
Projet d'articles modifiés du Projet de la Constitution sur la
démocratie directe en Tunisie :
Article 44 :
... référendum ou son
droit, dans le cadre de la démocratie directe, de présenter des projets de lois
et ce selon la procédure fixée par la loi selon les principes de cette
constitution.
Article 49 :
... et sa banlieue et chaque centre de collectivité locale des
gouvernorats du territoire de la République... et au Conseil de tenir
nécessairement une réunion chaque année au siège de chacune de ces
collectivités locales des gouvernorats de la République déterminée à tour de
rôle dans le cadre de la répartition géographique des gouvernorats et selon les
dispositions de la Constitution.
Article 55 (deuxième
version) :
... au Président de la République... au Conseil et, dans le cadre
du droit des citoyens à la démocratie directe, à un groupe de citoyens dont le
nombre ne doit pas être en dessous d'un pourcentage de signatures déterminé par
la loi, présentée sur une requête présentée à l'Assemblée du peuple proposant
des projets de lois et des amendements de lois. Cette requête est présentée
durant la réunion annuelle de l'assemblée du peuple au siège de l'une des
collectivités locales des gouvernorats de la République. Toutefois, les
requêtes présentées ne doivent pas se limiter aux citoyens dudit gouvernorat et
sont ouvertes à tout le peuple.
Article 59 (version amendée)
:
... tient... et dans le cas... et se réunit... un ordre du jour
précis. Et l'Assemblée tient une fois par an au siège de l'une des
collectivités locales une réunion durant laquelle sont exclusivement examinées
les requêtes présentées par les citoyens. Et dans le cas d'absences de
requêtes, les réunions sont consacrées au contact avec les citoyens de la
région et au suivi de l'application des lois dans la région.
Publié sur Nawaat