Ce qui vient de se passer à Sfax est d'une extrême gravité pour l'État de droit et l'islam, et il ne doit surtout pas être négligé ni relativisé; il y va de l'autorité de l'État et de l'avenir de la démocratie et de l'islam en une Tunisie tolérante et civilisée.
C'est Daech, rien de moins, qui vient de se hisser sur la chaire d'une mosquée de Tunisie; attention, il y a péril en la demeure !
Car ce qui vient de se passer à la mosquée sfaxienne est loin d'être anodin; il est synonyme du crime de hisser le drapeau de Daech sur l'une des chaires de nos mosquées.
L'État peut-il tolérer cela au nom de sa constitution, mais aussi de l'islam correctement interprété ?
Les faux arguments de l'imam
Le prêche criminogène en question est symptomatique de ce que j'appelle terrorisme mental et qui gagne insidieusement du terrain en Tunisie profitant de l'absence de réaction ferme et idoine de la part des autorités.
Qu'a fait l'imam de la mosquée Essalam (la Paix !) qui n'honore ni son titre ni sa fonction, car devant relever de l'exemplarité ?
Au prétexte de citer des textes anciens, il en choisit ceux qui fondent le terrorisme et justifient le crime de Daech, comme s'il n'y avait à citer que de tels textes obsolètes, apocryphes mêmes !
Cet imam indigne de sa responsabilité d'exemplarité peut certes toujours dire machiavéliquement qu'il ne fait que citer d'illustres ancêtres; ce faisant, n'instrumentalise-t-il pas de tels propos nullement avérés, car contestés et contestables — ce qu'il tait ? Ainsi, à tout le moins, et bien qu'on le prétend modéré, il se fait le complice objectif des daéchiens.
Qu'on le rappelle donc ! Ce qu'il cite du prophète n'est ni dans Boukhari ni dans Mouslem, les deux seules recensions authentiques de la Sunna faisant foi incontestable. Donc, il prêche le faux et n'est pas loin de faire œuvre de faussaire sur une chaire qui exige véridicité.
Ensuite, ce à quoi il réfère du Coran a été mal lu et commenté par les jurisconsultes qui ne l'ont fait, au reste, que pour leur temps, et surtout selon la tradition judéo-chrétienne qui était alors considérée comme véridique.
En effet, dans le droit musulman, il est établi qu'il n'est rien d'illicite sauf sur prescription expresse et claire, ne supposant aucune interprétation possible; or, il n'y en a pas dans le Coran !
C'est pour cela qu'on a vu les fuqahas de l'époque inventer un crime d'homosexualité en se référant à l'adultère; car, s'il existe dans la Bible, un tel crime n'existe pas dans le Coran. Alors, applique-t-on la Bible ou le Coran en islam ?
Un imam qui applique la Bible et non le Coran
De plus, aujourd'hui, cette tradition essentiellement judaïque est rejetée par les siens grâce aux acquis de la démocratie.
De plus, la science a enfin dit son mort en la matière; et c'est la science qui s'impose en islam qui est rationaliste.
Par ailleurs, quand cet imam — au mental daéchien à n'en pas douter dit — qu'il y a unanimité des jurisconsultes sur la prétendue homophobie de l'islam, il trompe éhontément les fidèles.
En effet, ni Abou Hanifa ni Chafaï, dans la plus sûre des deux affirmations rapportées de lui, n'ont attesté les faussetés qu'il colporte en cryptodaéchien. Ils sont même formels : rien, absolument rien, de sûr et de vérifié n'a été attesté de la part du prophète sur la question.
Il s'agit donc de savoir si l'on doit appliquer en matière d'homosensualité (le terme à retenir pour homosexualité, ce mot étant une création de l'Occident du 17e siècle) ce que dit le Coran et la Sunna authentique ou ce que prétendent à tort nos imams intégristes qui se trompent de religion, puisant dans une tradition judéo-chrétienne désormais périmée sur ses terres.
Rappelons-le encore une foi ici : le Coran n'interdit nullement une pratique relevant de la nature où le sexe est total, ne distinguant pas entre les sexes. Et c'est pareil pour la Sunna. Car l'islam, n'en déplaise aux rabbins de l'islam, n'est pas homophobe !
C'est ce qui a fait que le sexe, tant chez les Arabes que chez les musulmans, et du temps du prophète aussi, acceptait les relations homosensuelles. D'ailleurs, les gays, y compris les efféminés, côtoyaient notre prophète, étant même admis dans son intimité; car, modèle d'humanisme, il respectait leur nature choisie pour eux par leur créateur. Peut-on contester ce que décide Dieu pour ses créatures ?
En effet, contrairement à ce que veulent faire accroire nos obscurantistes au mental terroriste, l'islam est une religion de libertés et non un intégrisme criminel.
Aussi, aujourd'hui que l'oriflamme de Daech vient d'être hissée sur la chaire d'une mosquée de la seconde ville du pays, l'État tunisien est-il mis au défi d'y répondre le plus fermement possible.
Il doit d'abord sanctionner ce fonctionnaire daéchien et répondre à sa provocation de la façon la plus adéquate qui soit, et qui n'est que celle de la loi seule en mesure d'agir sur les mentalités viciées.
Il se doit abolir sans plus tarder la cause d'une telle turpitude, le honteux et criminel article 230 du Code pénal, cette survivance de la morale du colonisateur qui continue à défigurer notre foi tolérante et humaniste. Il y va de son autorité et de sa crédibilité à fonder un État de droit.