On ne le dira jamais assez : il ne sert à rien de parler dans le vide en utilisant des mots inappropriés aux choses. Foucault a déjà épuisé la question dans son maître ouvrage Les Mots et les Choses.
Agir en s'attaquant aux causes
Il en va de même avec les maux dont souffre la société et qui ont besoin de mots appropriés pouvant jouer bien plus que de médicament, un produit miracle, sésame ouvrant la plus hermétiquement fermée des portes donnant solution.
Car la solution préexiste toujours au problème, quel qu'il soit, pour qui sait chercher, s'improvisant bien moins chercheur que cherchant.
Or, nos problèmes, particulièrement ceux de notre Tunisie actuelle, sont moins physiques que psychiques, plus de perception de l'autorité que d'autorité tout court. En un mot, ils relèvent de l'inconscient collectif et de l'imaginaire populaire.
Ces deux structures anthropologiques de la conscience humaine sont peu, sinon mal instrumentées, pour soigner nos maux, les mots qu'on utilise — et donc les actions qu'elles impliquent — étant en décalage avec les réalités, sinon en rupture totale avec elles. Aussi néglige-t-on les causes, parlant dans le vide.
Pour illustrer cela, prenons le cas précis de l'hôpital Habib Bourguiba à Sfax qui est en souffrance par l'action inadmissible de quelques excités se réclamant du syndicalisme quand ils ne font que de la politique politicienne.*
Et on parle de faiblesse de l'autorité publique quand il ne s'agit que de la faiblesse du syndicat dont les instances ne savent pas ou ne veulent pas empêcher ses cadres régionaux à nuire à une saine pratique du syndicalisme dans l'esprit de Farhat Hached supposant le syndicaliste d'abord patriote, au service de sa nation.
Or, les menées des supposés syndicalistes de l'hôpital sont loin d'être patriotiques; on se soucie d'abord d'idéologie et non de santé publique! C'est le sens de cette récusation du directeur de l'établissement pour une raison farfelue, comme si des cadres militaires n'étaient pas parmi les meilleurs serviteurs de notre pays.
Au vrai, ce qui pose problème, c'est la non-appartenance du directeur, M. Chokri Tounsi, à l'idéologie des meneurs de la fronde et non son appartenance à l'armée.
Actionner les leviers politiques occultes
Aussi, ceux qui soutiennent en sous-main ces hurluberlus engagent aussi leur responsabilité et doivent tout autant être mis en cause. Outre l'inertie du syndicat, pourquoi ne dénonce-t-on pas publiquement l'impéritie du parti dont se réclament les supposés syndicalistes?
Ne doit-on pas l'inviter fermement à tout faire afin de mettre fin sans plus tarder à l'oeuvre de sape par leurs affidés des fondations sociales du pays, se jouant impunément de la santé des citoyens, mettant en cause gravement leur santé et le salut du pays? Ne doit-on pas se demander s'il ne nourrit pas des intentions cachées, laissant le chaos s'installer pour s'improviser sauveur du pays? En tout cas, c'est ce qu'impose à la pensée son inaction coupable.
Voilà ce qu'il faut dire et faire, non parler d'usage de la force, qui ne fait qu'envenimer les choses, aggravant le manque de confiance des uns et des autres dans la compétence de cadres n'ayant en vue que l'intérêt du pays et le service du citoyen. Or, c'est le cas du directeur qui est bien contesté pour des raisons idéologiques et non du fait d'une compétence avérée ayant motivé sa nomination.
Il est donc inadmissible, d'une part, que les autorités syndicales n'exigent pas sans plus tarder leurs trublions de mettre fin à leur mascarade qui serait loufoque si elle ne mettait en péril le salut du pays. Et il est encore plus inadmissible que le parti dont ils représentent et instrumentalisent l'idéologie ne réagisse pas ou trop mollement afin d'arrêter une telle criminelle bouffonnerie.
Que le ministre Said Aidi soit contesté dans son action par ceux qui ont une autre vision du service sanitaire de nos compatriotes est une chose, mais qu'il le soit pour de pures raisons politiciennes en est une autre. La première est légitime en démocratie, mais suppose une action sereine, réfléchie et surtout pacifique; et la seconde n'est qu'un attentat à la dignité de la politique, bafouant ses lettres de noblesse, faisant banqueroute de l'expérience démocratique en Tunisie.
On attend ainsi de l'UGTT et du parti Ennahdha une prise de position ferme sur ce mal qui ronge l'institution sanitaire sfaxienne, et ce en usant des mots qu'il faut. Il ne s'agira plus de juste louvoyer, mais de condamner avec fermeté et de prendre les décisions inflexibles mettant fin à ce qui se passe à Sfax. Il y va non seulement du patriotisme de ces deux acteurs majeurs de la politique du pays, mais aussi et surtout de leur patriotisme.
Qu'il soit syndicaliste ou politicien, le patriote aujourd'hui doit mettre fin de suite à ce qui est devenu une triste affaire tragi-comique, rétablissant l'état de droit dans ce gouvernorat du sud. Ce qui suppose que le directeur de l'hôpital Habib Bourguiba de Sfax quitte incontinent le bureau auquel il a dû recourir au sein de la direction régionale de la Santé afin de regagner son bureau au siège de l'hôpital. C'est un impératif catégorique.
Ainsi reviendra-t-on à une saine gestion politique de la cité où, plus que jamais, il nous faut mettre en oeuvre cette éternelle revendication des peuples à l'encontre des politiques : Res, non verba (Des actes, pas des mots) !
Publié sur Kapitalis