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jeudi 28 janvier 2016

Un amour de Tunisie 2

On ne s'aplatit pas quand on est digne ! 



Dans son éditorial du 26 janvier,* le journal La Presse choque toute conscience libre en Tunisie avec un titre provocateur en forme d'oxymore : Pour la Tunisie, je m'aplatis, affirme M. Slaheddine Grichi toute honte bue.

Comment accepter de s'aplatir encore en Tunisie où la révolution est justement synonyme d'orgueil et de dignité incarnée par tout son peuple ? M. Grichi ne ferait-il plus partie de ce peuple fier, par hasard ?

Certes, il nous dirait que c'est uniquement pour la Tunisie qu'il s'aplatirait; mais qu'est-ce la Tunisie, sinon son peuple ? Serait-elle le pouvoir en place ou bien cette jeunesse qui manifeste dans la rue quand elle n'est pas en prison brimée par les lois injustes de la dictature, toujours en vigueur ?

Si la jeunesse de ce peuple est en colère, pourquoi ne pas en tenir compte et agir pour comprendre les raisons de sa colère et y répondre ; n'est-ce pas servir la Tunisie ainsi ? N'est-ce pas le devoir éminent du journaliste que d'y répondre, éclairer le pouvoir en place au lieu de s'aplatir devant lui ?

Quelles sont donc les vraies raisons de la colère du pays, qui est jeunesse ? Nous en rappellerons ci-après les plus évidentes, appelant les plus urgentes et symboliques des réponses, réalisables immédiatement qui plus est.

Toutefois, nous ne le ferons pas avant d'avoir répondu aux fausses raisons de l'indigne aplatissement de notre journaliste qui ne fait pas honneur à son métier, le comprenant au mieux à l'antique. 

Les fausses raisons de l'aplatissement

C'est au nom de la liberté de la presse que M. Grichi viole cette valeur suprême magnifiée par la révolution tunisienne et commandant justement de ne jamais plus s'écraser devant aucun pouvoir. Oublier cela, c'est cracher sur ce qui s'est passé dans le pays, amenant à un certain 14 janvier dont on vient de fêter l'anniversaire.

À lire l'éditorial de La Presse, on se croirait revenu au temps de Ben Ali où les articles de presse ne manifestaient qu'une seule liberté, celle d'accepter honteusement de ne pas en avoir.

Certes, l'éditorialiste use de rhétorique dans laquelle tout faussaire est maître ; ne dit-on pas qu'il faut savoir mentir vrai, le summum étant de faire de la vérité fausseté ?

Ainsi, il cite les turpitudes de certains dans ce noble métier d'informer pour jeter l'anathème sur ses plus vrais serviteurs, ceux qui en font justement la noblesse et l'exception, honorant bien la mission d'informer selon les règles de l'art et la déontologie ; ce que ne semble plus faire la Presse à lire son éditorial.
     
Les arguments utilisés sont, au reste, ad hominem, contre l'homme : ceux de la raison d'État et du pouvoir ou des lobbys divers. Qui doute de l'existence de telles puissances occultes ? N'est-ce pas l'honneur de tout journaliste libre, ne courbant l'échine devant aucun seigneur du jour, que de les dénoncer ? En pointant du doigt certains, M. Grichi aurait été plus crédible en refusant de servir d'autres, acceptant même de s'aplatir devant eux ; car la démocratie est d'abord l'impertinence ; sans liberté de parole, il n'est nulle éthique au pouvoir.    

On le sait, le proverbe dit bien que celui qui veut noyer son chien l'accuse de la rage. Aussi, au prétexte des turpitudes des uns, à la faveur des impératifs de la lutte contre le terrorisme invoqués par les autres, on fustige la moindre parole vraie, y compris celle qui ne peut qu'être salutaire quand elle déroge à la bienpensance, refusant omerta du silence et diktat du conformisme.

Or, c'est ce dont a besoin le plus pour sortir le pays de sa crise qui est d'abord mentale, le terrorisme le plus grave étant celui qui git dans les têtes et qu'une presse asservie, ainsi que la veut M. Grichi, ne saurait qu'encourager. Il se contredit d'ailleurs puisqu'il reconnaît lui-même le "grand degré de conscience des journalistes qui ont privilégié l’apaisement et l’intérêt suprême de l’État" ; cela n'a-t-il pas été le cas des journalistes les moins soumis à la voix d'un quelconque maître, refusant le moindre aplatissement, conseillé pourtant par leur pourfendeur ?

Les vraies raisons de la colère

Non, M. Grichi, il n'y a rien de bon à cultiver une mentalité qui est toujours présente dans le pays, surtout chez ses élites délitées, coupées de ses réalités :  on ne peut plus s’aplatir pour le pouvoir ni de bon coeur, comme vous le faites, ni forcé et à contrecœur.

C'est justement la sauvegarde de la Tunisie, la vraie, celle du peuple qui est dans la rue, qui le commande, d'ailleurs. Ne pas s'aplatir consiste à dire ce que sont les raisons de la colère du pays et y répondre, quitte à déplaire au pouvoir en place. Car il n'y est que pour servir et non se servir. Or, qui le dira, sinon une presse libre et digne, ne s'aplatissant jamais ?

Plutôt que des paroles stériles, comme vous le faites, il faut demander des actes aux politiciens. Qu'on donne donc au peuple ses droits et ses libertés constitutionnels du moment qu'on n'est pas en mesure de satisfaire  son légitime droit au travail ! Qu'on exige pour lui, pour le moins, le droit à circuler librement, un droit de l'Homme incontournable ! On verra alors s'il applaudira son gouvernement ou s'il le conspuera comme il le fait aujourd'hui ! Car, c'est bien là une des vraies raisons de la colère du peuple, sa jeunesse notamment.

Or, sur ce plan international, le gouvernement accepte sans demander la moindre compensation en retour la grave concession à sa souveraineté consistant dans la levée des empreintes digitales de ses citoyens par des puissances étrangères. C'est déjà contraire au droit international, outre d'être une violation grave de la dignité du Tunisien dont l'honneur, la dignité et la maturité commandent qu'il puisse circuler librement, bénéficier de ce droit intangible de l'Homme, base de tout État de droit qui se respecte.

Cette base relève de cette autre qui est aussi une des raisons majeures de la colère des Tunisiens, à savoir l'absence de droits et de libertés dans le pays, encore géré par un arsenal juridique répressif, contraire à la Constitution. Que le gouvernement agisse, sur le plan interne, en réunissant au plus vite en une séance solennelle l'Assemblée des représentants du peuple pour décider la suspension de toutes les lois scélérates, celles  de l'ancien régime, mais aussi du colonialisme.

Que les journalistes se disant patriotes, au lieu de s'aplatir devant le gouvernement, exigent de lui ce qui précède, parfaitement possible et réalisable immédiatement, que cela soit sur le plan interne ou international !

Ainsi serviront-il vraiment la patrie et non le pouvoir en place, et ce sans perte aucune de leur dignité en s'aplatissant, car on ne s'aplatit plus en Tunisie où le peuple sait de sagesse immémoriale qu'on ne courbe point l'échine quand on est digne !

M. Grichi gagnerait certainement plus en sagesse en apprenant auprès de notre vaillant peuple son art de vivre, humblement certes, mais toujours dignement. Car c'est au pouvoir de s'aplatir devant le peuple en lui donnant son dû, ses droits à la liberté de vivre dignement !


Notre peuple les mérite amplement et il est capable de les arracher sans s'aplatir, avec dignité. C'est pour cela que le grand Farhat Hached a osé lui chanter son amour, s'écriant : je t'aime, ô peuple de Tunisie !

Il semble que l'éditorial ne soit plus en ligne; un cas de conscience?
Publié sur Al Huffington Post