Du « fake » en islam
Le terme « fake » (faux, truqué en anglais) s’est imposé en sciences sociales comme un outil pour explorer autrement la vérité et ses variations en un temps fait de falsifications scientifiuqes et de mirages astronomiques, le réel étant voilé non seulement pas les facultés humaines limitées de perception, mais aussi par la nature même du monde.
Ce réel en plein désenchantement est ainsi réenchanté, devenant même plus réel que la réalité et les les observations scientifiques et épistémologue se rejoignent pour dessiner de la vérité une nouvelle constellation alétheiologique, un bassin sémantique pour reprendre l’expression de Gilbert Durand.
Relativement à l’siam, ce fake est à la fois représenté par un droit officiel supposé islamique alors qu’il est à forte connotation judéo-chrétienne et une pratique populaire taxée d’hértisme alors qu’elle puise dans ce que l’islam a de plus original, sa fibre humaniste qu’est le soufisme.
La spiritualité, seule pérennité
Plotin disait dans ses Ennéades : « Jamais un oeil ne verrait le soleil sans être devenu semblable au soleil ni une âme ne verrait le beau sans être belle ». Cette vérité que le monde est le miroir de Dieu et que notre âme est seule en mesure de le refléter est une vérité cardinale soufie, la raison d'être même du tasawwûf.
En islam soufi, il ne suffit pas de marcher vers Dieu, mais il est impératif de savoir marcher en Dieu. Être capable de Dieu est la nature du croyant vrai, l'humain ontologiquement, du fait de sa nature originelle, la fitra islamique, en mesure d'honorer le divin en lui car, comme l'affirme Sanâ'î, l'un des premiers poètes mystiques de l'Iran, inspirateur entre autres du grand Rûmi : «il est des cieux dans le royaume de l'âme qui gouvernent les cieux de ce monde ».
L'homme, en islam vrai, l'islam soufi, est un microcosme qui reflète le divin; il est donc le miroir du macrocosme. D'où cette quête absolue chez le soufi de l'annihilation ou fanâ' en Dieu, cette mort mystique, une mort aux sens et aux vanités du monde pour naître u renaître à l'essence humaine, la spiritualité, seule pérennité dans la permanence divine, le baqâ' soufi.
Ainsi, comme tout provient de l'essence divine, tout y retourne. Cela permet de magnifier en islam la valeur de l'effort maximal, le Jihâd Akbar, et de la foi culturelle, spirituelle, sur le culte et les simples rites qui ne rendent nullement compte du génie de l'islam, son essence. Le rituel islamique n'est que la simple introduction à la foi, une sorte de hall d'entrée dans la maison d'islam.
C'est en ce hall que se tiennent ostensiblement les musulmans qui ne se soucient que d'honorer l'accessoire qu'est le rituel, délaissant le principal, le spirituel. Or, c'est celui-ci qui commande les actes et les purifie, faisant la piété vraie. La première attitude supposée légale est en fait islamiquement illégitime, étant héritée du formalisme judéo-chrétien; la seconde, jugée illégitime, est légalement islamique étant conforme à l'esprit et à la lettre islamiques
Les tartuffes de l'islam
Pour prendre l'exemple du ramadan, on voit bien le souci des croyants formalistes, inspirés don de la tradition judéo-chrétienne, de montrer ostensiblement qu'ils jeûnent, allant même jusqu'à l'imposer par la force physique ou celle de la loi, commettant un sacrilège en islam où il est avéré pourtant qu'il n'est nulle contrainte en religion.
À ces tartuffes de l'islam, peu importe si dans le même temps on ne prie pas, par exemple, ou encore mieux, qu'on ne se soucie point de la raison première du jeûne qui est de prendre part à ce qu'endurent les pauvres qui ne trouvent rien ou si peu à manger. Bien au contraire, on voit en ce mois du jeûne se multiplier les habitudes les plus saugrenues d'excès alimentaires, ce qui viole bien plus le fondement même du ramadan que le fait de ne pas jeûner et de le montrer publiquement. Car l'islam à l'origine, l'islam soufi, est d'abord liberté.
C'est toute la différence entre l'islam pur des soufis et l'islam altéré que nous voyons chez nous, sans parler de sa caricature ultime qu'est le salafisme. Dans ces soi-disant islams, le croyant se suffit des apparences — et on sait à quel point elles sont trompeuses ! —, négligeant ce qui ne trompe point, l'Intérieur, le bâtin.
Or, Dieu s'est lui-même décrit décrit dans le Coran comme étant à la fois Dhâhir et bâtin (Extérieur et Intérieur), ayant révélé ses signes « aux horizons et dans les coeurs ». Et comme ce sont ces horizons, sa création, qui indiquent Dieu au dehors, c'est au croyant de l'indiquer du dedans. Et il n'est qu'au coeur illuminé d'être en mesure de la faire, un coeur mystique, celui du seul vrai musulman.
Il est bien temps que les musulmans sortent leur religion du fake où elle se trouve ou, pour le moins, en fassent un outil pour mieux comprendre la confusion totale dans laquelle ils sont plongés, comme quand on use du faux pour avoir le vrai. La conscience du fake assumée deviendrait alors le moyen de s'interroger sur ce qui relève de l'islam et ce qui n'y est qu'adventice, cette religion reconnaissant toutes les révélations précédentes puisqu'elle en est le sceau.