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I-SLAM : ISLAM POSTMODERNE








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lundi 28 octobre 2013

De rétromodernité à postmodernité 4

Révolution et contre-révolution ou la loi des marrons du feu


Tirer les marrons du feu :
Il est une expression qu'on emploie parfois à tort et à travers et qui résume la dialectique existant entre la révolution, quelle qu'elle soit, et la contre-révolution. J'en tire une loi que je qualifie de loi des marrons du feu.
Tirer les marrons du feu est la locution par laquelle l'on veut dire qu'on se donne de la peine pour autrui, seul profiteur de notre labeur. La loi des marrons du feu est donc le fait que ce sont d'autres qui jouissent des fruits de notre œuvre sans y voir le moindre titre.
C'est ce qui se passe en Tunisie. Et cela n'est ni nouveau ni surprenant. Pour l'histoire ancienne, arabo-musulmane en l'occurrence, rappelons comment l'esprit éminemment démocratique de l'islam a été assez vite détourné de son essence avec les Omeyyades. Le règne monarchique de cette dynastie a été préparé par le troisième calife Majeur quand, durant la seconde moitié de son califat, il se détourna des principes de gouvernance de ses illustres prédécesseurs.      
Pour nos temps contemporains, notons qu'aucune révolution populaire n'a réellement abouti à l'instauration du pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple.
En Russie bolchevique, ce fut le centralisme supposé démocratique, le peuple étant réduit à une caricature de représentation, celle d'une poignée de militants au service d'une idéologie qui a vite renié ses fondements populaires pour ne faire que profiter du pouvoir.
En France, on eut assez vite une restauration et même un empire. Et les différentes républiques qui se sont succédé, dont la cinquième, n'ont jamais été en mesure de conserver en permanence le pouvoir au peuple.
Révolution et contre-révolution :
En Tunisie, certains parlent aujourd'hui de contre-révolution, dénonçant les menées de supposés profiteurs cherchant à détourner la Révolution de son cours, quand ils ont été les premiers à le faire, n'ayant eu en vue que de se maintenir au pouvoir et d'en exclure leurs opposants.
Que ceux-ci aient été aux commandes et que certains parmi eux en avaient profité ne fait aucun doute; mais est-ce une raison d'y inclure les intégres qui n'étaient certes pas hors du pouvoir, mais qui n'avaient fait que servir le peuple et les intérêts de la patrie en premier ?
Que ceux qui parlent aujourd'hui au nom du peuple, se présentant comme les seuls porte-parole de la Révolution, ne sont pas tous des révolutionnaires est aussi une  évidence. Certains parmi eux n'ont fait que se servir d'une étiquette affichée d'opposition au régime pour servir au moins un ego surdimensionné. Et on le voit aujourd'hui à la manière dont ils se désintéressent des attentes du peuple alors qu'ils disposent de tout le pouvoir ou d'une partie conséquente pour le servir. 
C'est la loi des marrons du feu qui veut cela : le peuple tunisien dont le Coup fameux, cette révolution 2.0 ou postmoderne, n'a fait que tirer les marrons du feu pour les profiteurs; et il en est dans les deux camps, majorité comme opposition.
Servir véritablement le peuple :
Aujourd'hui, servir la Révolution, suppose tout d'abord un dépassement de l'aversion manifeste que la conservation ou la quête du pouvoir fait naître et cultiver chez les uns et les autres.
Aujourd'hui, servir le peuple, c'est tenir compte de ses exigences; et elles ne peuvent se résoudre simplement par la rédaction d'une constitution ou l'organisation d'élections.
Le peuple de Tunisie est désormais saisi par l'esprit de la postmodernité qui est celui de la souveraineté des foules. Celles-ci sont les seules détentrices du pouvoir, une puissance sociétale instituante que le pouvoir institué ne saurait plus ni représenter ni remplacer.
C'est de démocratie directe qu'impose l'âge des foules dans lequel la Tunisie est entrée de plain-pied. Si nos élites, quel que soit leur bord, veulent être véritablement révolutionnaires, elles doivent tout faire pour aider à aller dans le sens de l'OpenGov, des médias réellement libres et du pouvoir véritable et prééminent du peuple à l'échelon local et régional, à travers la société civile et des instantes du cru opérationnelles.
Elles ont intérêt à renforcer la décentralisation poussée de l'État en octroyant le pouvoir de décision autonome à des élus locaux, implantés dans leur terroir et au fait de ses réalités, ses problèmes et les solutions à y apporter, y entretenant des rapports personnels, directs et réguliers avec la population.
Les pouvoirs publics classiques ne doivent plus être coupés du peuple et d'instances locales au pouvoir décisionnel véritable; elles ne peuvent qu'être des instances de représentation chargées d'harmoniser les décisions initiées et confirmées à l'échelle locale.
Les schémas pour la concrétisation constitutionnelle et institutionnelle de cette démocratie réelle ne manquent pas; et ils doivent être au plus vite envisagés, car l'ère de la démocratie formelle est révolue.
On ne peut plus prétendre bâtir une démocratie en postmodernité sur les reliques d'un passé fait d'élections de président et d'assemblées nominalement représentatives, y compris législatives, et qui ne sont plus en mesure de représenter la puissance sociétale et la souveraineté populaire qu'un court laps de temps tout en prétendant en tirer une légitimité durable se transformant asses vite en dictature véritable, même si elle est censée être limitée dans le temps.
Ce qui était encore possible hier n'est plus tenable à l'âge des foules. Que les révolutionnaires, les vrais, y pensent avant qu'une réplique du Coup du peuple ne l'impose à une classe politique qui se contente de profiter des marrons que d'autres, qui doivent être les premiers à en jouir, ont tirés du feu. En âge des foules, la loi des marrons du feu n'est que le chiffon rouge agité devant le taureau des corridas. Qu'on y réfléchisse !