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samedi 21 septembre 2019

Théâtrocratie et daimoncratie 4

Rendre hommage à Ben Ali tout en dénonçant sa dictature?




La mort est, plus que jamais, l’occasion de renouer avec la parole de vérité. Ahmed Néjib Chebbi, dont personne en Tunisie ne conteste le brillant passé de militant pour les droits humains et sa qualité de farouche opposant au dictateur Ben Ali, a osé le faire, rendant hommage au patriotisme du défunt*, malgré son oeuvre détestable en matière des droits et des libertés.

C’est d’autant plus honnête et courageux de sa part que le patriotisme de Ben Ali ne fait nul doute même aux yeux de ses opposants et ennemis, bien qu'ils ne soient prompts qu'à le juger sur son oeuvre en matière des droits humains.

Or, ils auraient été fondés à avoir tel comportement partiel et partial s’ils avaient fait montre de plus de respect que lui de ces droits qu’ils violent tout autant que lui, même s’ils mettent la forme, simulant juste un respect formel trompeur. La preuve éclatante est qu’ils gardent en l'état sa législation scélérate, dont la plus flagrante, celle sur le cannabis qui a valu à la dictature un tollé des démocraties.

Pour la vérité 

Pour la vérité, j’aimerais apporter aussi mon témoignage sur l’homme, ayant été en service diplomatique sous sa dictature, n'y ayant nullement été empêché de militer pour les valeurs humanistes, mais à l’ombre, tout en étant à l’intérieur même de l’Administration.

S'il m’a été possible de le faire, comme nombre de Tunisiens, c'est que je ne cherchais nulle notoriété ni n'instrumentalisais ce combat pour les valeurs comme nos révolutionnaires d'aujourd'hui.

Ainsi, dès mon affectation en qualité de consul adjoint de Tunisie à Strasbourg en septembre 1983, j’ai mis de l’ordre dans le service de la chancellerie, rompant avec une pratique généralisée à l'époque, conditionnant la délivrance du passeport, et la moindre opération administrative d'importance, à l’adhésion au parti unique. Et cela a duré quasiment une année sans nul empêchement.

Certes, on a bien fini par me punir, mais ce fut par une mutation-promotion à Paris en qualité de consul au consulat général où j’ai continué au mieux de servir les intérêts de notre communauté, notamment quant aux conditions de séjour. Ce qui a fini par me faire repérer en 1992, non pour une nouvelle punition, mais me valoir d’être appelé à l’ambassade en charge du service social. Encore une promotion au vu des services rendus à la communauté !

Bien mieux ! Outre cette qualité de Conseiller social de l’ambassade, on m'a confié en sus, une année après, le dossier des  droits de l’Homme. Comme le reste de mes cas sociaux, j’ai traité ce délicat dossier selon les règles de l’art et de l’éthique surtout, continuant à irriter les aficionados de la dictature dans l'Administration; mais ils n'y étaient pas les seules autorités à décider, ce qui a fait que j'ai été en mesure de servir la cause des droits de l'Homme dans le pays  jusqu’à la fin de 1995.

Durant cette militance discrète mais efficace, j'ai même réussi à amener l’ambassadeur de l’époque à admettre le meurtre en prison d’un militant sous la torture. J’ai d’ailleurs rendu hommage à cet autre digne serviteur de la patrie, Abdelhamid Escheikh**.

Il est vrai — c'était fatal — ma carrière a été, au final, saccagée, ayant été radié du cadre diplomatique; une pratique courante de la dictature, faut-il le rappeler. Toutefois, le plus grave, c’est que je n’ai pas réussi à faire lever cette injustice ni à recouvrer mes droits légitimes depuis la chute de l'ancien régime. À ce jour, je bataille en vain pour ces droits contre une administration autiste, usant de subterfuges et de prétextes pour ne rien faire, rompre enfin avec sa démission coupable; elle excipe même aujourd'hui de l’âge de la retraite atteint pour justifier son inertie coupable.

Pourtant, en 2016, elle a fini par reconnaître l’injustice, promettant de la lever en me proposant, dans l'attente, un recrutement en qualité de prestataire de services au cabinet du ministre des Affaires étrangères. À la vérité, ce fut juste une manoeuvre détournée pour se dédouaner à ne rien faire, estimant le dossier politiquement gelé à la Direction de la Fonction publique. Refusant d’être en quelque sorte acheté de la sorte, payé à ne rien faire et m'en satisfaisant, j’ai refusé, à la fin de l'année du contrat, de le renouveler alors qu’il est normalement reconduit tacitement à l'échéance.  

L'adage du Nemo auditur

Voilà des faits véridiques, sur la passe de la dictature, mais aussi le présent de la nouvelle dictature dans le pays; des faits que personne ne saurait contester et que j’ai tenu à rappeler en guise de témoignage à partir d'un cas concret.

L’injustice dans le pays a survécu à Ben Ali; elle est le fait de tout un système toujours en place avec sa législation invariablement en vigueur. C'est donc loin d'être la dictature d’un seul homme dont il serait malhonnête de douter du patriotisme, même s’il a largement failli en termes des droits citoyens et des libertés politiques et sociales.

Ceux dans la classe politique actuelle qui font de Ben Ali un monstre se révèlent plus monstrueux que lui et bien moins patriotes, démontrant chaque jour n'avoir pas en vue les intérêts de la patrie comme il l’avait, quoique cela ait été défiguré par ses dérives dictatoriales. L'adage latin du Nemo auditur dit bien que nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude !

En somme, la dictature tunisienne n’est pas que physique; tout comme le terrorisme dont souffre le pays au reste, elle est aussi morale, surtout mentale. La situation de la Tunisie hic et nunc l’atteste bien.

Alors, de grâce, cessons de médire d'un mort et veillons à nous distinguer de sa part du diable, et qu'il a fini par regretter, en ne cultivant pas la nôtre. Veillons surtout à ne pas le singer et ce en répudiant ses lois et ses pratiques scélérates incontinent, cultivant plutôt la justice que je ne suis pas le seul à réclamer dans ce pays, preuves à l'appui.             

 

Le vibranthommage d’Ahmed Néjib Chebbi à Zine Abidine Ben Ali






 Publié sur Réalités